Sur la plage ensanglantée d'Ostia, la voiture s'acharne à rouler d'avant en arrière, d'avant en arrière.
Les os craquent. C'est la mort de Pasolini.
Leon like a lion
Sleeping in the Sunshine.
Lion lies down
Out of the strong came forth sweetness
Il est ici question du Lion de Samson, racontée dans Le Grand Livre. Le cadavre du Lion, colonisé par les abeilles, était devenu une formidable ruche à miel. Le miel, "sweetnes", arrive dans l'album, et colonisera symboliquement toute la discographie du groupe par la suite. Le miel sera toujours rattaché à la mort et/ou au sexe.
Le premier titre de l'album, lui, développait une belle, dansante quoi qu'industrielle; apologie de la sodomie, une sorte d'ultravirilité palpitante et brute.
En 1987, on mourrait beaucoup du Sida. Et en Angleterre, la gouvernance Thatchérienne n'avait que peu de considération pour la mort massive d'homosexuels et de toxicomanes, individus les plus touchés par cette maladie contre laquelle on ne savait pas encore vraiment lutter.
Près de Geff et Peter, un ami meurt. Et puis d'autres amis meurent. Un amant meurt. Finalement, le sexe et la mort se trouvent si proches que les rapprocher, les confondre, ne corresponds plus à un fantasme conceptuel mais à une réalité palpable. Le miel du plaisir sexuel, qu'il s'agisse d'une faible ou d'une puissante fusion, en compagnie de qui que ce soit, se révèle être un pas vers la mort.
L'orgasme n'est plus la petite mort, mais la mort tout court.
Mais alors quoi, on devrait arrêter de baiser ? Certainement pas. On combat, et on reprends de plus belle. Slur, et Penetralia, par leur rythmique même, sont des pénétrations sonores. La symbolique Sun/Sons qui demeurera par la suite chère à Coil naît également ici, des années avant les "Triple Su(o)ns" a enterrer.
And the winds
blow round
This Roman land
this sleeping town
This sleeping town
Of Roman sands
And Roman sons.
And it seems to me
That when I
close my eyes
All the lights in the world
Go out
La mort est toujours là, mais on s'acharne contre elle. Surtout, on affirme qu'on la connait de près. On ira même parfois jusqu'à l' vouloir s'allier a elle pour contrer la peur. The Golden Section marque le sommet d'importance de ce thème dans Horse Rotorvator de manière très pragmatique : la voix est celle d'un speaker de la BBC, douce et concrète, contrastant fortement avec la pensée ésotérique développée par le texte. Ainsi, on appelle l'occulte à être universellement offert, et l'on rapproche au passage une bonne fois pour toute la mort au désir, présumant, au fond de l'humanité, un désir de mort constant : c'est le Grand Fantasme.
"We are told that Azrael, Death, appears to our spirit in a form determined by our beliefs, actions, and dispositions during life. He may even manifest invisibly, 'so that a man may die of a rose in aromatic pain' – or of a rotting stench. When the soul sees Azrael, it 'falls in love', and its gaze is thus withdrawn from the body as if by a seduction. Great prophets and saints have even been politely invited by Death, who appears to them in corporeal form. Thus it was with Moses, and with Mohammed. When the Persian poet Rumi lay on his deathbed, Azrael appeared as a beautiful youth and said, "I am come by divine command to enquire what commission the Master may have to entrust in me."
La magnifique reprise du Who By Fire de Leonard Cohen nous avait, peu avant, énoncé de nombreuse manières de retourner au Créateur. Bien que la liste ne fut pas totalement exhaustive, elle est tout de même d'une certaine conséquence : barbituriques, feu, suicide, assassinats, accidents...
A propos de ce texte, que Balance chante de manière si habitée, Leonard Cohen disait :
“According to the tradition, the Book of Life is opened and in it is inscribed all those who will live and all those who will die for the following year. And in that prayer is catalogued all the various ways in which you can quit this veil of tears…the conclusion of the song, as I write it, is somewhat different: “Who shall I say is calling?” Well, that is what makes the song into a prayer for me in my terms, which is who is it or what is it that determines who will live and who will die? What is the source of this great furnace of creation? Who lights it? Who extinguishes it?” —Leonard Cohen
En somme, une prière pour les morts. A l'image de l'album. Une prière musicale vibrante, brute, originale et habitée pour les morts et les vivants, la cohabitation des vivants avec la morts des leurs, la tristesse d'une sexualité menacée de mort contre balancée par une affirmation puissante et symbolique immense de cette même sexualité adorée.
1987 fût le pilier central de la phase Solaire de Coil, dont le feu d'artifice quasi-final sera Love's Secret Domain, quelques années plus tard.
Un immense album. Musicalement, symboliquement, spirituellement.
Une oeuvre d'art qui ne sera jamais vieille.
“On the Eve of the Apocalypse – the Four Horsemen betray their steeds – slitting open the animal throats – and in doing so release the Second Great Deluge – Horsegore – (The air choked with horsehair) – Infinite Divisibles Split – An infinity of open sewers.
“The Four then fashion an immense earth-moving device from the collective jawbones – The Horse Rotorvator – with which to plough up the waiting world – (ROTA turns through 180 degrees to TARO) – Wheels replace Horses – Dark Horses Run – Dark Horses Run Deep (We plough the fields and scatter Our Dead Steeds on the land) … and Hell is paved with horseflesh”
- Gravé sur le vinyle original.
14/01/2017 - Toulouse