Le saxophoniste/claviériste Stephen Singleton parti, harassé par trop de tournées, et les deux membres restant conscients de l'échec de Beauty Stab, c'est vers une toute nouvelle image qu’ABC décide de se diriger. Ils demandent à Fiona Russell Powell et David Yarritu de rejoindre la bande, mais seulement en tant que figurants… Ils n'auront pas leurs mots à dire sur les chansons et contribueront seulement par leurs looks (sur scène et dans les clips) à l'aspect « cartoon » d’ How to be a Zillionaire. Cela ne les gênent pas vraiment, ils ont un vrai travail à côté.
Pourquoi ce nouveau look cartoon ? Pour pouvoir dénoncer le côté mercantile, infantile et artificiel de la décennie, qu'ils critiquaient déjà d'une manière moins subtile, moins fun et moins pop sur leur précédent album.
Si l'image se renouvelle, le son tente un retour aux sources. On oublie les grattes rugueuses et électriques de Beauty Stab pour reproduire une patte plus Lexicon Of Love… Oui mais voilà, depuis 1982, la patte « Lexicon » est devenue la nouvelle norme, c'était d'ailleurs pour éviter la répétition et l'imitation qu’ABC avaient réalisé Beauty Stab… Ils ne sont plus à une contradiction près, les revoilà avec un How to be a Zillionaire qui se fondra dans la masse de sorties de 1985.
Le succès ne sera donc encore une fois pas au rendez-vous en Angleterre, malgré quelques percées dans le top 50. Le single « Be Near Me » les fera tout de même connaître en Amérique, rentrant dans leur top 10, ce qui n'est pas rien !
La bande a beau se démêler pour nous refaire le coup d'un Lexicon, les chansons ne sont jamais au niveau. Résultat, on se retrouve avec des compositions qui en font trop, poussives, pleines d'artifices, de synthés et d'autres effets pour parer aux mélodies moins efficaces. Ça fonctionne parfois, j'ai réussi par exemple à me faire prendre par les délurés « Fear of the World » et « So Hip it Hurts ». Mais les tout aussi foufous « 15 Storey Halo » ou « A to Z » (morceau assez drôle quand on sait que la moitié des membres s'y présentant ne feront plus partis de l'équipe dès la fin du processus de promotion) offrent un son déjà trop daté et laissent dubitatifs.
Pour le reste, on a en vrac un sous Prince/Jackson avec « Vanity Kills », des ballades difficilement convaincantes comme « Ocean Blue » ou « Between You and Me » et le gimmick scat de « Tower of London »… d'ailleurs tout l'album est rempli de gimmicks musicaux sympathiques, qui, lorsqu'ils ne tombent pas dans l'excès, donnent une raison aux fans d'y rejeter une oreille de temps en temps.
Avec How to be a Zillionaire, ABC sont donc à la reconquête de leur génie Pop, ce qui est selon moi une bonne chose. Ils arrivent même à l'atteindre de temps à autre, ce qui réjouira tout amateur de son 80’s. Malheureusement, c'est encore là un album qui souffre la comparaison à Lexicon.
Le côté « Looney Tunes » ne prendra pas non plus, un critique allant jusqu'à dire du groupe qu'ils sont devenus la Famille Adams de ce genre de musique. C'est donc en toute logique que Fiona et David quittent le navire. Cette première regrettera que les deux membres restants, amis d'enfance, soient devenus exactement ce qu'ils dénoncent, l'oubliant par la suite, obsédés par leur succès.
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