Dernièrement on a pu entendre Rakim parler d'un changement radical pour 2010. Dur de croire réellement les paroles d'un artiste dont on attendait un retour fulgurant et qui au final nous a à peine satisfait avec "The Seventh Seal". Mais lorsqu'on écoute l'album du Strong Arm Steady on est pas loin de se demander s'il n'avait pas raison. L'année démarre sur de bons rails...

Si la côte West des Etats-Unis continue de faire parler d'elle c'est particulièrement grâce à ses artistes undergrounds qui ont opté pour une autre vision du Hip Hop. Les rappeurs consciencieux sont sortis de l'ombre et prennent désormais le dessus sur un Gangsta Rap à bout de souffle. Après plus de sept ans d'attentes Mitchy Slick, Phil Da Agony et le sulfureux Krondon rassemblent enfin leur énergie sur un seul et même album. Le départ d'Xzibit en 2006, tête d'affiche du groupe, avait encore plus réduit nos chances de voir sortir cet album officiel, mais ce n'était sans compter la confiance et les espoirs qu'avaient Talib Kweli pour ce trio en les signant un an plus tard sur son label Blacksmith Records. Une aubaine pour ces jeunes loups dont on commençait à douter de les voir un jour sur un projet concret. Avant de sortir dans le courant de l'année leur opus via la structure de Kweli, nos compères nous régalent et nous séduisent ici en collaborant avec le producteur/multi instrumentistes dont l'inspiration et la productivité ne s'arrête jamais, j'ai nommé Madlib. Avec "In Search Of Stoney Jackson", le prodige au indénombrable pseudonyme se retrouve une nouvelle fois l'unique concepteur et le maître d'une alchimie délicieusement fusionnelle. Ni jazzy, ni gonflé à l'hélium, ni écourté par les interventions caverneuses d'un vengeur masqué, pour s'allier avec ces trois rappeurs qui ne mâchent pas leurs mots l'ambiance se veut résolument soulful. Choix peu original dans le Hip Hop me direz-vous, mais lorsqu'il s'agit de Madlib derrière les commandes vous pouvez comptez sur lui pour qu'il insère le bon sample, le bon scratch, le grain de folie qui fait mouche.

Pour ne rien vous cacher c'est d'ailleurs le côté magique des productions madlibiennes qui est le gros point fort de cet album. Sans cela les performances de Krondon et Phil Da Agony n'aurait pas du tout la même saveur. Je met volontairement à l'écart Mitchy Slick qui au final, et par une certaine incompréhension de notre part, n'intervient qu'à deux petites reprises tel un featuring. Pour parer à une éventuelle lassitude du flow et des textes pas des plus inspirés des deux protagonistes principaux, une grosse partie de "In Search Of..." se voit entourer d'invités proches du crew: Phonte ouvre le bal et donne le ton avec un refrain suave et hypnotique comme à son habitude sur "Best of Times". Majestueuse ambiance planante avec "Chittlins and Pepsi" avec un Planet Asia qui à la bouche qui pétille comme du soda dès que l'instru est balancée. Le rookie de l'année 2009 Fashawn marque "Questions" de sa présence mais ne la fait décoller pour autant. Il fallait aussi bien sûr compter sur la présence de Talib Kweli qui leur montre la voie à prendre sur "Get Started" avec un très bon couplet lâché par le boss, ce qui nous fait penser que ses prochaines retrouvailles avec Hi-Tek s'annoncent excellentes. On pourrait croire à une oeuvre en provenance de Détroit avec cet air fracassant qui transpire de "Pressure", l'esprit de J Dilla devait planer au dessus de Madlib à ce moment la, mais c'est bel et bien un produit 100% importé de la cité des anges sur lequel pose Sick Jacken et Mitchy Slick. Quelques tracks sortent du lot et se laissent écouter en boucle, à l'image de ce grain de vinyl toujours efficace et de ce sample Soul envoutant utilisé sur "New Love" avec Chace Infinite & Tri-State. Il n'y a pas d'autres mots que 'banger' pour qualifier cette tuerie qu'est "Ambassadors" avec sa basse qui fait très très mal, tout comme ce bestial "Needle in the Haystack" qui sent la jungle grâce à l'acharnement de Guilty Simpson et Roscoe.

Le duo n'a en revanche besoin de personne sur "Cheeba cheeba", ils tirent leur joint à deux et s'évadent sous cette épaisse fumée de marijuana qui plane au dessus d'eux. Strong Arm Steady au complet? Il aura fallu attendre la fin du disque et le convenable "Two Pistols" pour que ça se réalise. On reste clairement sur notre faim une fois l'écoute terminé, il y a comme un manque d'énergie et de motivation de la part de Krondon et Phil Da Agony, encore heureux qu'il y ai une bonne liste d'invité pour égayer le tout. L'album traîne trop la patte par moment pour en être satisfait et pourtant il y avait largement les moyens de créer quelque chose de grandiose sur ces productions ingénieuses. Déçu également que la superbe production de l'interlude "Telegram" ne soit pas plus exploitée. Allez on attend le vrai prochain album des Strong Arm Steady, ceci n'était qu'une étape d'échauffement.
Bobby_Milk
7
Écrit par

Créée

le 20 déc. 2011

Critique lue 114 fois

1 j'aime

Bobby_Milk

Écrit par

Critique lue 114 fois

1

D'autres avis sur In Search of Stoney Jackson

In Search of Stoney Jackson
matic
8

Critique de In Search of Stoney Jackson par matic

Tout est partie d’un CD comportant 15 nouveaux beats de Madlib que J.Rocc a passé à Krondon et Phil The Agony en début d’année dernière, puis les 2 membres du Strong Arm Steady ont commencé à...

le 7 mai 2013

Du même critique

MM..FOOD
Bobby_Milk
9

Critique de MM..FOOD par Bobby_Milk

Miam...Depuis « Operation: Doomsday » qui date de 1999, MF Doom a sorti de nombreux autres projets sous divers pseudonymes ; des mixtapes, et autres bootlegs. Il a également collaboré avec d'autres...

le 22 déc. 2011

27 j'aime

Will Rap for Food
Bobby_Milk
9

Critique de Will Rap for Food par Bobby_Milk

Kno et Deacon. Des noms d'artistes qui avant 2001 ne nous disaient vraiment pas grand chose. Débarquant de leur cambrousse sudiste, ces deux fauchés, dont les chemins se sont croisés en 98 alors...

le 21 déc. 2011

24 j'aime

1

Man on the Moon: The End of Day
Bobby_Milk
8

Critique de Man on the Moon: The End of Day par Bobby_Milk

-Phase d'essais, entraînements- Avoir le sentiment de pouvoir faire quelque chose de ses dix doigts malgré qu'on soit encore dans l'enfance, c'est ce que voulait exploiter le jeune Scott Mescudi...

le 20 déc. 2011

15 j'aime