Jouant avec les nerfs de tout le monde à travers ses différentes prises de parole et sa propension à repousser à l'infini des projets (RIP Yandhi) avec pas moins de trois dates non respectées pour ce dernier en date, Kanye West est un sujet délicat à aborder. Lui, pourtant, cherche désormais à expier ses fautes et se rapprocher du Tout-Puissant par le biais de la musique, prêchant pour un style pur, plus proche du Gospel que de cette saleté de rap.
Si chacun aura sa propre appréciation de la part réelle d'honnêteté derrière le propos, le bénéfice du doute doit être accordé d'un point de vue processus créatif.
Un disque forcément attendu, comme à chacune de ses sorties tout d'abord, mais également au vu de la hype autour des Sunday Services, sorte d'église musicale ambulante redonnant la foi aux fans de la première comme de la dernière heure pour un possible chef d’œuvre ultime.
Des ardeurs sans doute vite douchées par le format une nouvelle fois ultra-court proposé: 11 titres s'étalant sur moins d'une demie-heure, de quoi frustrer son monde.
Cependant, en l'état actuel des choses, peut-il offrir plus ? Sa fragilité mentale couplée à son perfectionnisme monomaniaque exacerbé depuis The Life of Pablo aux vingtaines de retouche après publication l'empêchent peut être d'accepter de finaliser un mastering complet et de dépasser les 4 minutes par morceau.
Il faut alors se contenter de ce qu'il a à donner et avec le recul, c'est déjà pas mal. Car Ye reste un artiste à part, boulimique de l'originalité et du renouvellement, une usine à idées qu'il ne canalise peut être pas toujours mais qui, sur une durée si courte, n'a aucune concurrence. Chaque titre de Jesus is King présente au minimum un passage intéressant où l'on se rappelle le génie de la composition qu'il sait être. Alors oui, c'est parfois bref, ça va vite mais il y a plus de matière en 26 minutes que sur des discographies entières.
L'esprit gospel ne sert au final que de prétexte et l'aspect musical est plus large, regroupant une palette qu'on lui connait déjà entre sample soul (God Is), orchestration dolby stéréo (Selah), synthé Graduation (On God), envolées alternatives (Water). Moins fade que son prédécesseur Ye, "Jesus is King" se fait concis mais ultra-concentré, futile mais épique. Des contradictions qui résument parfaitement le paradoxe de son auteur.