PNL, c'est un peu l'incarnation du "de la musique avant tout" de Verlaine.
Ils ont formé leur singularité en piochant allègrement dans la witch-vaporwave, dans l'utilisation modèle du vocodeur par certains rappeurs ricains (parce qu'en France, son usage est souvent bien sale) et dans des trucs plus classiques. Leur esthétique étant en somme une synthèse harmonieuse du tout : ils abandonnent l'aspect cheap de la vapor pour y préférer des clips ultra propres (à coup de 2 milliards d'images par seconde) à l'image de leurs instrus.
Les prods sont en effet exécutées hyper soigneusement. Elles sont assez simples mais efficaces : des morceaux équilibrés déclinés de la vapor.
Ceux qui viennent faire la différence, ce sont les jeux vocaux extrêmement puissants. La vacuité due au caractère clean de l'ensemble n'est qu'un leurre : toute la puissance de l'album tient dans l'association entre cette simplicité et les multiples variations de l'usage de leur voix. En plus d'être l'instrument mélodique omniprésent, elles portent l'ensemble de l'album. Ademo et NOS ont bien assimilé l'enseignement des poètes symbolistes : le son fait sens. Les jeux de sonorité, la musicalité de certaines phrases, la tonalité d'autres, tous ces facteurs font de Le Monde Chico un album puissamment expressif.
Je pense notamment à Sur Paname, dont la mélancolie ambiante est portée par la voix plaintive d'Ademo qui ouvre le morceau en laissant difficilement traîner ses dernières syllabes. S'ajoute à cela de multiples petite voix du fond sonore, toutes aussi différentes les unes que les autres, ce qui est rendu possible par cet usage quasiment parfait du vocodeur. Le paroxysme est atteint lorsqu'il lâche "j'rentre en s'mi avec du seuuuuuuuuum, j'partirai seul en balaaaaaaaaade". Puis les voix sont doublées pour encore plus de puissance.
Le rythme donné par les jeux d'allitérations ou de sonorités singulières font masse dans l'album. Simplement encore dans ce même refrain : " j'suis seul, ah ouais sa mère, des fois j'rêve de la mer". Les lyrics volent pas haut, et ce dans tout l'album j'admets. Mais tout est dans cette manière originale de le vocaliser (la sonorité est hyper importante), beaucoup plus expressif que les paroles elles-mêmes. Et cette forme d'expression est évidente à travers l'usage massif de l'argotique qui transforme souvent les premières écoutes en des séance de décryptage : c'est parce qu'à vrai dire, y a pas besoin de toujours comprendre ce qu'ils disent, juste de suivre la manière dont ils le disent qui signifie d'autant plus le spleen contemporain qu'ils formulent. Parce que comme le disait Mallarmé, la poésie, c'est ce qui est composé de pleins d'abolis bibelots d'inanités sonores, le poème, c'est cette hésitation prolongée entre le son et le sens.
Du coup, sous ce prisme là, bah PNL c'est quand même de la super bonne poésie quoi qu'on en dise. J'pense que la comparaison avec l'objectif symboliste peut être développé sur des années, mais bon. Pnl sa s'intellektualise pas sa se vi.
Ils ont créé leur monde singulier qu'ils cultivent encore dans leur dernier single en date La vie est belle et leur prochain album est prometteur.