If I had ever been here before
I would probably know just what to do
Don't you?
(Déjà vu)
En 2016, j’avais perdu l’un de mes artistes préférés et cette disparition fut si soudaine et brusque qu’elle entraîna une petite dépression de plusieurs mois. Ce n’était pas facile de perdre l’un des rares dieux que l’on était prêt à vénérer de par son immortalité même si l’unique signe qu’il nous laissa, une gigantesque étoile noire dans l’espace infini, signe final de sa venue sur notre monde, montrait qu’il était hélas, d’une certaine manière, terriblement mortel comme nous tous. Et cette fin qui le rapprochait donc fatalement de nous puisque quelque part il nous y a précédé.
Et puis là en 2023, je perds un autre de mes artistes préférés, un mentor de nouveau (1). Avec cette différence toutefois que j’avais moins grandi avec celui-ci que j’y étais venu toutefois sur la longueur, par amour de la musique et de la mélodie. C’était d’une certaine manière inévitable, je pense. Au début on connaît tous une forte tête (Neil Young), puis on se penche sur le groupe qui l’accompagne (Crosby, Stills, Nash & Young), on finit par regarder les carrières solos des gus qui touchent aussi pas mal leur billes, autant que le canadien. Et de fil en aiguilles, on découvre des perles, voire des chefs d’œuvres (2). Pendant longtemps un disque est resté sur ma table de chevet, son auteur n’ayant guère continué en solo… Jusqu’à son retour inespéré en 2014 (3). Par la suite tout s’est enchaîné et ce fut comme je si je renouais avec un vieil ami. Jusqu’à sa disparition au début de 2023 à 81 ans.
En 2018, j’eus toutefois l’opportunité de le voir en concert à l’Olympia.
Une tournée très intimiste, sobrement intitulée « David Crosby and friends », resserrée effectivement sur un petit groupe. David Crosby donc puisqu’il s’agit bien de lui, accompagné de ce qu’il appelle le « Lighthouse band », en fait le line-up des amis musiciens déjà à l’œuvre avec lui sur les superbes « The lighthouse » (2016) et «Here if you listen » (2018 et au passage (4)), c’est-à-dire : Becca Stevens, Michelle Willis et le stakhanoviste Michael League (qui, quand il n’est pas en train de sortir un énième album des Snarky Puppy son groupe de base, est invité un peu partout ou sort un ou deux disques en solo. Il en a sorti un dernièrement en 2023 avec Bill Laurance).
Le live suivait l’album de 2017, Skytrails (Here if you listen n’était pas encore sorti) également proposé au petit comptoir près de la salle de concert de l’Olympia avec The lighthouse. Mais au concert, quelques unes des nouvelles chansons de Here if, étaient déjà proposées en avance. On les retrouve ici dans ce live cette fois plus recentré donc sur l’album du Lighthouse band que le disque avec Crosby signant seul sur la pochette. Et curieusement, pas de chansons de Skytrails dans la trackliste (l’excellent « Capitol » aurait mérité d’y figurer en live pourtant au même titre que « She’s got to be somewhere »). Bon, tant pis. Ce qui nous donne en gros :
- 2 titres de If I could only remember my name (1971)
- 5 titres issu de Lighthouse (2016)
- 5 de Here if you listen (2018 - si on prend en compte la nouvelle version à 4 voix de « Woodstock »)
- 3 titres issus du passé CSN/CSNY (les mythique Guinnevere, Carry on et Déjà vu. 4 si on rajoute la fabuleuse « Woodstock » créditée à Joni Mitchell).
- Enfin le morceau « Regina » vient de Becca Stevens qui le proposait également à sa manière sur son premier album solo.
Rien du superbe "Croz" de 2014 ni même du Sky trails de 2017 donc mais bon tant pis.
En l’état la musique est superbe de toutes façons et ça réjouit le fan que je suis d’avoir une dernière fois un disque du regretté Crosby. Sans surprise, les voix et harmonies se conjuguent merveilleusement et l’on a affaire à une belle soirée de folk et folk-rock de toute beauté. Tout ce petit monde prend son temps et parfois les compositions sont étirées pour notre plus grand bonheur. By the light of common day et Look in their eyes culminent donc à 6mn tandis que la toujours aussi géniale Déjà vu avoisine les 10mn. C’est beau à pleurer bon sang.
Je me souviens que quand je suis allé à mon concert, j’étais à l’étage à l’Olympia. Et la salle de concert était à moitié remplie. Beaucoup de place sur les gradins à l’étage, une sensation étrange d’assister aux derniers feux d’un géant et le fait que la salle de concert soit à moitié remplie ou vide, ça m’avait donné une certaine mélancolie. L’impression que plus personne ne voulait écouter l’un des derniers géants du folk et de la musique en général.
Aussi je ne t’oublierais pas mon cher David. J’essaierais de propager ta musique et son héritage du mieux que je le peux. Maintenant comme dans ta chanson co-écrite avec Stills, Wooden Ships, tu peux naviguer vers d’autres horizons sur de larges vaisseaux de bois, nous capitaines musicaux, nous veillerons du haut de nos phares sur chaque paysages musicaux.
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(1). Un David puis un autre David. David B puis ici, David C. Au passage je ne connais pas de David A. ou David D (que l’on pourrait surnommer aussi « Dédé »).
(2) Je ne tarirais jamais assez d’éloge sur ce disque qu’est « If I could only remember my name » que j’ai même chroniqué ici avec amûr ( https://www.senscritique.com/album/If_I_Could_Only_Remember_My_Name/critique/92174049 ) !
(3) Bon du coup : https://www.senscritique.com/album/Croz/critique/110930880
(4) Plop : https://www.senscritique.com/album/here_if_you_listen/critique/181058398