Après un premier album studio (Radioactive) qui n'avait su satisfaire les attentes des fans, Yelawolf (Michael Wayne Atha de son vrai nom) se devait de produire un second opus à même de renouer avec la qualité de ses précédentes mixtapes.
Ne cherchez plus, voilà qui est chose faite avec Love Story, une réussite en tous points.
Love Story, qu'est-ce donc ? Il s'agit du second album du protégé d'Eminem sous le label Shady Records. Et la principale qualité de cet album, c'est que Yelawolf a pu suivre sa volonté propre et livrer un rap bien loin des standards actuels. On le sait, Yela laisse bien souvent tout un tas d'influences diverses et variées venir enrichir sa musique et comme il le dit lui-même: impossible de prédire le style de son prochain projet. Pour l'heure, Love Story se pare d'une influence rock et country certaine. Loin de perdre l'album entre deux styles (ni rap, ni autre), Yelawolf fusionne les deux pour en faire ressortir le meilleur.
Le rap est bon, fluide, technique. Le chant est sublime, la voix douce, mélodieuse. S'il se trouve mis en avant dès la seconde track (Change), c'est avec American You (track 03) qu'il prend tout son sens. Enfin, il atteindra son apogée sur l'émouvant Have A Great Fly (track 15), symbole d'un artiste qui s'élève bien au-delà du rap dans lequel il a déjà fait ses armes.
Mais surtout, on salue cette voix, parfaite pour le chant,en harmonie avec le rap. A aucun moment on a le sentiment du refrain chanté cadré pour le passage en radio. Non, Yelawolf nous emmène simplement dans son univers, où genre et influences diverses se mêlent dans un pot-pourri aux superbes senteurs.
Alors, évidemment, ce mélange particulier des genres peut facilement accoucher d'un rejeton hybride, mais la diversité de toutes les influences livre une homogénéité véritable: rap hargneux sur Love Story (track 13) ou encore le couplet final de l'excellent Empty Bottles (track 09) d'une part, couplé à un aspect d'avantage country mâtiné d'une faible touche de pop (dans le bon sens du terme pour une fois) d'autre part; avec des chansons telles qu'American You ou encore Heartbreak (track 10). Un mix des genres qui, d'une manière générale, permet d'aborder des thèmes intimistes, Yelawolf se révélant à travers de nombreux titres: son amertume envers certains de son entourage avec le single Till It's Gone (track 06), son rapport à la scène sur Johnny Cash (track 07), les allusions à sa célébrité au travers de l'interlude Ball & Chain (track 05). On note également la religion par l'intermédiaire d'une longue prière sur Disappear (track 17) et Best Friend (track 08).
Best Friend qui se révèle d'ailleurs le seul featuring de l'album. A défaut de s'entourer de multiples artistes, au risque qu'ils s'insèrent bien mal dans un univers certes maitrisé mais finalement bien personnel; Yelawolf n'invite que son mentor Eminem qui lui offre un excellent couplet comme à son habitude, au flow sous stéroïdes. Techniquement, on aurait apprécié que Yela nous fasse à nouveau démonstration de ses accélérations dont il a le secret. Ici, ce sera d'avantage sa voix de chanteur qui sera mise en exergue (bien qu'il sache maitriser un flow tonique, notamment sur Empty Bottles). Aussi la concurrence de flow sur Best Friend n'aura pas lieu, ce qui est somme toute assez dommageable si l'on tient compte d'un Eminem toujours très en forme comme à son habitude. Yelawolf ne lui donne pas le change, mais le son reste de qualité et reflète à lui seul ce mariage entre rap et chant qui caractérise l'album.
Enfin il convient de se pencher sur la production, globalement assurée par Willpower et Malay, à l'exception de Have A Great Flight personnellement produit par l'artiste lui-même. On distingue une utilisation récurrente de la guitare acoustique pour ce qui est des instrus: Ball & Chain, Devil In My Veins (track 07), Have A Great Flight,... Le tout renforçant l'atmosphère et l'aspect serein et intime de l'ensemble de l'album.
Ceux qui attendaient un rap plus "brut" en seront peut-être pour leur frais, car on ne retrouve pas de morceaux tel que le fameux Pop The Trunk par exemple. Mais il serait bien triste de passer à côté d'un tel album. On peut regretter une trop grande importance accordée au chant, si bien que par moment, on a un peu de mal à considérer Love Story comme un album rap à part entière. Mais c'est là toute la particularité de Yelawolf qui se laisse emporter par ses influences sans que l'on sache de quoi sera fait son prochain projet. Pour l'heure, le rap est certes présent avec Outer Space ou encore Whiskey In A Bottle, puis se fond dans la country sans toutefois perdre sa consonance urbaine.
Love Story, rap mâtiné de coutry ou country mâtiné de rap ? Il s'agit surtout d'aborder l'oeuvre sans aprioris, simplement prêt à suivre l'artiste dans une virée au coeur de l'Alabama. Car que l'on soit fan ou non, Yelawolf nous ouvre les portes de son univers sur la route d'une voix douce et mélodieuse.
Frais, original, un grand cru de l'année 2015. Toujours sincère, offrant simplement l'album qui lui plait. Et c'est peut-être là la grande force de cet opus: un album qui trouve d'abord écho dans le coeur de son créateur. Une bien belle réussite...
SONS A RETENIR
Till It's Gone
Best Friend
Have A Great Flight
Empty Bottles
Heartbreak