JVLIVS Prequel : Giulio
6.9
JVLIVS Prequel : Giulio

Album de SCH (2024)

"Ils ont sûrement dû dire qu'j'étais fini"... Ce n'est certainement pas anodin si l'on retrouve Sch avec cette phase pour débuter son couplet dans Cannelloni, annonçant son album JVLIVS Prequel : Giulio.

En effet, après un JVLIVS II n'ayant pas rencontré le succès de son prédécesseur et un Autobahn d'autant plus décrié, le S semblait avoir perdu de son aura auprès du public. D'une partie du public seulement cependant, car question popularité, l'artiste marseillais a su s'asseoir confortablement à la table du rap game. La popularité grandissante acquise avec Bande Organisée notamment (responsable dirons certain d'une perte de qualité dans sa musique), le rôle de juré dans Nouvelle Ecole,... Peut-on réellement parler de flop lorsque pourtant tout semble vous réussir ? Qu'à cela ne tienne, le natif d'Aubagne compte bien poursuivre sur sa lancée et, alors que tous attendaient le tome III sensé conclure la trilogie, c'est finalement une préquelle qui nous est dévoilée.

Plus fidèle que jamais à son style puisant ouvertement dans le cinéma et l'influence des longs métrage de grand banditisme, Sch nous fait retrouver le personnage de Giulio déjà dépeint à travers les deux opus précédents. Le court métrage dévoilé juste avant l'album appuie cette idée et permet de se plonger dans un univers qui ne quittera pas l'auditeur pendant les 18 tracks composant les 55 minutes du projet. Depuis Le Baptême nous faisant assister à la naissance du protagoniste dans la douleur jusqu'à Batterie vide et son sombre message d'espoir ("Mourant comme tout le monde mais vivant tant qu'on saigne"), on retrouve les images de violence et d'un vécu entre drogue et guerres de territoires si chères à ce bon Julien.

Pour marquer tout cela, tout le déroulé de l'album retrouve ses interludes marquées par une narration contée (que le regretté José Luccioni avait su sublimer) et permettant de lier l'ensemble et les diverses temporalités évoquées dans le court métrage.

A l'image des naissances de sagas mafieuses, Sch semble ici opérer un retour à ses origines musicales également. On avait pour habitude d'entendre parler du "Sch période A7", et l'artiste a parfaitement su faire plaisir aux fans. La maîtrise du vocoder et le timbre de voix si particulier avait su séduire en 2015 ? Ici on retrouve tous ces ingrédients, telle que nous le décrit la recette de la piste 5.

Rappelant les accroches frontales Comme Si, Anarchie ou encore Cervelle, Prequel (au magnifique clip) donne immédiatement le ton, enchainé par Crois-moi et Garcimore. Plus de "julisation", retour à un rap cru et qui saigne ("On part on laissera plus qu'les écrits et les tripes" - Crois-moi), des images de réussite toutes mafieuses ("J'suis au Pullman avec deux pornstars dans les locaux comme la dream team" - Garcimore) et une ode aux grosses sommes ("Quelques millions d'euros pour panser mes plaies" - Beaux Arts). Au milieu de toute cette vie de crime, Sch sait aussi manier le verbe dans des moments plus personnels et intimistes, sublimés dans le magnifique Les hommes au yeux noirs ou le plus solaire Gris. S'accordant d'avantage à l'introspection, il évoque quelques sentiments étouffés ("J'coupe les ponts j't'ai mis dans mes souvenirs / J'peux pas t'aimer le cœur est trop p'tit" - Gris) et se laisse aller au chant autotuné dont il a le secret sur Ciel bleu.

Au travers de tous ces titres, on ne peut que saluer la superbe homogénéité du projet (qui faisait défaut à JVLIVS II et ses morceaux tel Mode Akimbo qui ne trouvaient pas leurs places). Ici, l'enchainement est fluide, tant par les interludes que l'excellente musicalité de certaines prods (l'outro de Les hommes aux yeux noirs, tout simplement magnifique) ainsi que la dernière minute de Batterie vide qui laisse l'auditeur s'apaiser en même temps que l'album. Pour cela, si l'on ne retrouve pas l'association avec Kore ayant fait sa renommée, l'artiste a su s'entourer de plusieurs noms connus du milieu : 2K et Gancho qu'on avait déjà pu entendre à l’œuvre sur Autobahn, Seezy (Désaccordé - Vald; Hors Ligne - Freeze Corleone), BBP (la majorité des classiques de PNL, J Respect R - Damso)... Si la multiplication des beatmakers fait souvent courir le risque d'un projet aux multiples sonorités, ici l'unité sonore est préservée et conserve une atmosphère unique tout au long de l'écoute. Le mixage, d'excellente qualité, atteste d'un bien beau projet qui brillera très certainement dans la discographie du Scélérat.

Sch remet la ge-gor du rap sous son Gillet avec JVLIVS Prequel : Giulio, et réalise un excellent retour à ses fondamentaux tout en poussant la musicalité perdue sur l'album précédent. Rimes mordantes, accent hargneux, le rapper sait se montrer agressif, ambitieux, mais aussi tout simplement humain. Un projet pleinement réussi, qui restaure trois lettres de noblesses dans le paysage du rap français.

Un dernier mot pour la route ? Mathafack !

SONS A RETENIR

Les hommes aux yeux noirs

Gris

Crois-moi

David_AVINENC
8
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Créée

le 3 juin 2024

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7 j'aime

David_AVINENC

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