Je suis plutôt rarement nostalgique et en l'occurrence on ne peut l'être d'une période précédant sa propre naissance. Mais là... Je me mets à la place (du moins j'essaie) de l'auditeur du début des années 90 qui revient de chez le disquaire avec cette jaquette entre les mains et s'empressant de mettre le disque dans sa chaîne stéréo. Il a dû être sonné, impressionné par cette entrée en matière qu'est Only Shallow (une des meilleures premières pistes pour un album du genre). Il se souviendrait toute sa vie la première fois qu'il l'a écouté avec ses riffs entêtants et distordus suivant la batterie qui commence rageusement ce morceau.
Et tout l'album sonne comme cela avec parfois autant de succès que Only Shallow : des titres comme When You Sleep ; Sometimes ; Soon ; I Only Said, tant de sons saturés et saturants qui donneront des maux de tête aux plus sensibles. La voix de Bilinda Butcher se fait lointaine et mélancolique comme pour contrebalancer ces guitares agressives par sa douceur. Par ailleurs le songwriting est tout aussi à fleur de peau et est aussi minimaliste sur la plupart des chansons.
Ce disque est très justement considéré comme l'un des piliers du shoegaze car il en présente toute les caractéristiques exposées plus haut et on peut difficilement le catégoriser dans un autre genre.
C'est donc du shoegazing sans concession que nous livrait MBV avec ce "Sans amour" (Manque d'affection ou incapable d'aimer) issu d'un travail acharné de près de 3 ans avec un homme à la barre : Kevin Shields. Entre boucles rythmiques samplées et l'utilisation quasi-constante de barres de trémolo, et un enregistrement dans 19 studios avec plusieurs producteurs, ce qui a failli ruiner Creation Records(avec qui ont signé d'autres groupes important de shoegaze comme Slowdive), on ne peut pas dire que le perfectionniste Kevin Shields n'ait pas eu ce qu'il voulait ni plus ni moins.
Et tant pis pour ceux qui n'aiment pas...