"The streets raised me to be wise and honorable"
Cormega et Large Professor ont plus en commun qu’un quartier (Queens) et une année de naissance (1973), les 2 vétérans ont un véritable amour pour le Hip Hop (avec 2 grands H) et une définition identique qu’ils nous proposent ensemble sur ce projet ‘Mega Philosophy’. Un album que Mega définit comme "un projet qui me dira, si oui ou non, je peux prétendre être sur cette fameuse liste des plus grands emcee. Je suis un lyriciste, un MC, mais avant tout, je suis un poète qui s’exprime sur un beat."
Une association rappeur / beatmaker qui ne pouvait que me plaire sur papier, et je ne me faisais pas trop de soucis sur le contenu, qui au final il faut bien le dire, est exactement ce que je m’étais imaginé. Après cette courte intro ‘A New Day Begins’, on a droit à une nouvelle version de l’excellente série de morceau ‘MARS’ de Cormega et Large Professor. Après ce titre ‘MARS’ avec donc (M)ega, (A)ction Bronson, (R)oc Marciano et (S)aigon présent sur le dernier LP ‘Professor @ Large’ de Large Pro, on retrouve cette fois-ci (A)Z, (R)edman et (S)tyles P aux côtés de (M)ega pour un échange verbal de très très haut niveau qui lance parfaitement l’album.
Avec les 2 morceaux suivant, ‘Industry’ et ‘More’, Cory McKay égratigne brillamment le milieu du rap en pointant du doigt les vrais gagnants de cette industrie qui ne sont ni plus ni moins que ces dirigeants de maison de disque dont le seul talent est de toujours réussir à faire signer des contrats dans lequel l’artiste se retrouve au final la personne la moins rémunérée sur le produit final… Il encourage aussi une bonne partie de ces collègues rappeurs à être un peu plus créatif et honnête, une réflexion qui revient aussi sur cet interlude a capella ‘Reflection’ (une tradition sur les projets de Mega).
Retrouver Cormega et Nature ensemble sur un même morceau, c’est toujours un jolie clin d’œil au passé quand on sait ce qui s’est passé entre les 2 MC’s en 1997 (Mega a été remplacé par Nature sur l’album du groupe The Firm avec une flopée de beef qui suivront que ce soit avec Nas et Nature). Une bonne performance des 2 artistes sur ce ‘DU (Divine Unity)’ qui est vite éclipsé par cette excellente collaboration ‘Honorable’ avec Raekwon, le tout sur un beat enivrant d’Xtra P qui aboutit au final à un véritable street banger certifié ("The odds don’t lie, look at mine, acknowledge truth. The streets raised me to be wise and honorable").
Avec ‘Rap Basquiat’, Cormega ne rend pas seulement hommage dans le titre de ce morceau à l’artiste peintre Jean-Michel Basquiat, il fait un parallèle avec cette mentalité artistique qui devrait faire avancer tout artiste, cette envie d’aller plus loin à l’image du travail néo-expressionniste du peintre dans les années 80. L’un des gros morceaux de cet album avec un 2ème couplet de Mega qui pourrait même mettre le feu à une banquise. Le titre ‘Rise’ est dans la même mouvance que le titre précédemment cité, le tout dans un style un peu plus posé mais toujours efficace, contrairement à ce morceau ‘Home’ (avec Black Rob) qui a tendance a se trainer un peu je trouve…
Et c’est tout à fait logiquement que ce projet se referme par le titre ‘Valuable Lessons’, Cormega y fait un bilan de toutes les épreuves qu’il a traversé aussi bien dans l’industrie de la musique que dans sa vie personnel, un morceau qui marche parfaitement avec ce type de beat de Large Pro, à noter quand même un refrain assez faiblard pour conclure l’album… De manière générale, et c’est peut être le petit point faible de cet opus en ce qui me concerne, Cory McKay délègue quasiment tous les refrains sauf sur ce banger ‘Honorable’. Sur des prods de Xtra P j’ai toujours un peu du mal avec les refrains chantés, je trouve que ça ne se marie pas forcément bien, de la à dire que c’est du gâchis je n’exagérerais pas…
Un projet court (32 minutes) qui est à la hauteur des attentes, bien différent du dernier album en commun ‘Still On The Hustle’ de Large Professor avec Neek The Exotic, on a droit à une sélection de beat peut être un peu moins marquante, car moins pêchu dans l’ensemble, mais qui correspond beaucoup plus à l’esprit "poète" revendiqué par Cormega (et donc moins agressif que Neek). Avec ce ‘Mega Philosophy’ on tient indéniablement un opus qui a toutes les qualités pour finir en fin d’année dans un Top Albums, dans le mien en tout cas il devrait y trouver une place.