Lugubre beauté
À la fois l’un des films les plus emblématiques de Lynch et l’une des OST les plus significatives de Baladalementi, son alter ego musical, duo inséparable. Et pour cause : aux images torturées,...
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le 4 oct. 2024
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À la fois l’un des films les plus emblématiques de Lynch et l’une des OST les plus significatives de Baladalementi, son alter ego musical, duo inséparable.
Et pour cause : aux images torturées, lugubres et elliptiques répond une musique tout aussi poisseuse, inquiétante mais aussi mélancolique.
Le style est immédiatement identifiable : nappes sonores, presque étouffées, cuivres et cordes inquiétantes, et expérimentations. La musique est lugubre et magnifique tout à la fois.
Comme sur le film il plane une ombre, un trouble sur la musique, qui revient, insistante, avec le même thème obsédé et obsédant.
Badalamenti illustre l’obsession macabre du personnage principal, son trouble secret. Sa musique, à l’inverse du film froid et distant de Lynch qui surplombe ses personnages qu’il dissèque ensuite dans un twist terrible et glaçant, suggère un sentiment de malaise, celui du personnage dual, déchiré en deux. Le thème d’amour n’est rien de moins qu’une marche funèbre, quand elle n’est pas une oraison lorsqu’elle est reprise par un orgue. La musique c’est son cœur sombre et consumé. Un peu, dans un autre style, comme la musique de Georges Delerue dans Le Mépris de Godard : l’obsession mélancolique de ce personnage qui veut quitter son mari, de cet amour déjà terminé qui est l’émotion la plus pure dans un cinéma aussi technique et froid que celui de Godard, qui n’est pas exempt d’ailleurs, comme celui de Lynch, d’expériences et d’étrangetés.
Ici aussi la musique est l’indice le plus sérieux du drame intérieur qui se joue. Des villas ensoleillées de Beverly Hills aux rutilants studios d’Hollywood, la musique ne se drape d’aucune illusion. On sait que quelque chose cloche à la moindre note comme subrepticement dans un coin de la caméra de Lynch. On ne peut que penser à une partition similaire de Badalamenti pour le film L’adversaire, qui dépeint le macabre secret du tueur Jean-Claude Romand. La musique, sombre, tranche avec l’apparente tranquillité et banalité de la vie de cette famille, qui n’est qu’une illusion.
Bien sûr, l’émotion dans cette bande originale est entrecoupée de bizarreries dignes du film. Plusieurs morceaux d’ailleurs présentent une masse sonore dissonante entrecoupée du thème principal qui arrive pour s’évanouir presque aussitôt, aspiré par les ténèbres. Sans espoir. Les dissonances sont maîtresses, les bruits aussi, ainsi que les standards américains et le jazz, qui achèvent de dessiner le portrait musical des hauteurs de Los Angeles. Le spectacle, l’illusion du luxe, de la gloire et de la fortune : tout y est.
Mais voilà, compositeur et réalisateur sont d’accords : contrairement au nom de cette ville, la musique n’a rien d’angélique, si ce n’est à la toute fin, dans une infime clarté. Tout le reste n’est que désordre et vulgarité, stupre, glace et putridité.
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le 4 oct. 2024
Modifiée
le 4 oct. 2024
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