Mummy and Daddy
7.4
Mummy and Daddy

Album de Whitehouse (1998)

Je sens qu'on a atteint le point de non-retour avec cet album. Je ne sais vraiment pas si on peut faire quelque chose de plus dérangent que ça. Je l'ai écouté en me disant que j'allais écouter l'un des albums les plus sombres, mais c'est bien plus que ça. Cet album atteint des intensités dans sa façon de décrire ses sujets qui sont juste au paroxysme de la violence et de la perversion. Mummy And Daddy est l'album le plus fascinant de Withehouse de très loin. William Benett (le leader du groupe) lui-même reconnaît que cet album est le plus fascinant de sa discographie :


« This album is actually quite a worrying one for me. There is a neurosis about some of this work that is genuinely shocking and reaches an intensity that even I could never have dreamt of discovering. There is no explicit sexual content whatsoever - some of the themes cover domestic violence and abuse, subjects that held little interest to me until relatively recently. It will be a sexy record though, in my opinion - but not in the way most people would recognise. In fact, I think a lot of Whitehouse fans may even intensely dislike this album and, by the same token, I don't think we'll acquire many new fans from it. That doesn't really trouble me at all - there is a beauty about music when, on those very rare moments, it takes you to a level where you think it can't get any better. Perfection at a given moment. These feelings mixed with some of this subject matter, however, are deeply disturbing. »


William Benett.


Cette citation est extrêmement importante pour la compréhension global de l'album. On comprend qu'il est censé être le paroxysme, le véritable chef-d'œuvre de Whitehouse que ce soit dans musique ou dans son point de vue. Car le point de vue de Mummy And Daddy est précisément ce qui rend celui-ci profondément dérangent à écouter.


En effet l'album traite de pédophilie, d'inceste, d'abus psychologiques et de viols et va jouer sur une incapacité de compréhension face aux situations présentées tout le long de l'album. Selon moi, les 4 premiers morceaux vont jouer sur notre incapacité en tant que témoin direct de ces abus d'avoir de l'empathie pour la victime. Ce n'est pas une incapacité formelle, on n'a pas un rejet instinctif ou un profond dégoût face à la victime. C'est bien plus subtil que ça, on a fondamentalement envie d'avoir de l'empathie pour cet enfant, cependant est-ce que cette envie est capable de subsister dans un album de Whitehouse. Évidemment que non, nous sommes bloqué par l'avalanche de bruits, de voix complètement saturés partant dans les aigus, les espèces de vagues de sons sales répétitifs et nauséeux qui engloutissent tous le reste et par les paroles qui sont tout simplement immondes, tournant autour de l'invective, de sous-entendus sordides et pervers, d'insultes :


« Who do you think you are?

Who the hell do you think you are?

Who the fuck do you think you are?

You stupid fucking cunt

Do you talk that way to your sister?

Would you talk that way to your momma? Eh?

Come on, cunt, do you talk that way to your momma?

Do you talk that way to your momma?

Didn't she teach you any manners? »

Mummy And Daddy, Philosophy of the Wife-Beater.

« Pay attention

Let me wipe your face, your little lip and cheeks

This is what adults do

This is what adults do »

Mummy And Daddy, Daddo

Et c'est ce blocage qui rend l'album très dérangent, nous sommes bloqués dans une spirale de violences, de viols, d'insultes que nous ne pouvons pas comprendre. Et donc nous nous retrouvons à ne plus avoir aucunes empathie pour personne. Et ce constat triste, voir cruel et pourtant le plus brillant possible. Car selon moi le message universel de cet album est tout simplement que rien ne peut être compréhensible si vous ne l'avez pas vécu dans la réalité. Le viol, l'abus psychologique et physique, l'insecte sont des choses que l'on ne peut pas comprendre si on ne l'a pas vécu, si on ne l'a pas vécu. Jamais vous ne pourrez avoir de l'empathie pour ces victimes, jamais vous ne pourrez vous mettre à leurs places, jamais vous ne pourrez comprendre leurs traumatismes car tout simplement vous ne les avez pas vécus.

Et tout ce message est symbolisé dans le dernier morceau (Private) qui est un simple collage sonore de plusieurs interviews de personnes ayant vécues les abus qui sont traités dans le reste de l'album sans la moindre instrumental derrière. Et comme pour le morceau Bird Seed, il y a un rappel très sordide à la réalité, une réalité que nous ne pourrons jamais comprendre.

Cet album est tout simplement fascinant tant il est dérangent. En effet, Mummy And Daddy est le véritable chef-d'œuvre de Whitehouse.


Ayllich

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