Le phénomène Rap revient avec un nouvel album, le cinquième bébé d’une lignée noble certifiée de platine et d’or. My World est sorti le 4 décembre dernier, autrement dit : le même jour que Nero Nemesis et Rohff Game, entre autres. Rien de très intimidant pour le marseillais à la productivité parfois exagérée.
En interview pour OKLM, Booba déclarait n’avoir peur que de Jul et il y avait de quoi, niveau chiffres en tout cas. Jul comptabilise 66 394 exemplaires écoulés (49 711 exemplaires physiques et 16 683 en digital), sans parler de l’explosion des compteurs d’écoutes streaming. En constatant un tel succès et en remarquant qu’aucun média n’avait chroniqué l’album, Hype Soul a voulu se lancer dans l’aventure. Coup de folie, casse-pipe ou bonne initiative ? On le saura bien assez tôt.
Depuis ses démêlés avec le label Liga One Industry et son départ définitif de celui-ci, Jul a monté sa propre structure, humblement baptisée D’Or et De Platine – comme le titre en featuring avec Gradur, oui. C’est donc estampillé de cette nouvelle étiquette que sort cet opus de 21 titres. En indépendant toujours, ce qui est respectable sur le fond. Chez Hype Soul, quand c’est fait pour et par le Hip Hop, on aime. C’est pourquoi nous avons souhaité nous intéresser à l’image « rap » renvoyée à toutes ces personnes qui écoutent et achètent du JUL.
On peut dores-et-déjà vous affirmer que cet album n’a rien de Hip Hop. On comprend mieux le titre de l’album, du coup. Jul a inventé un nouveau genre musical totalement farfelu, qu’on a presque envie de qualifier de Rap de Chicha, sans vouloir offenser personne. Nous avons pour habitude de citer l’intégralité des morceaux dans nos chroniques et pour être tout à fait honnête, il sera extrêmement difficile de le faire ici. Tous les tracks se ressemblent !
Quelques sons seraient néanmoins à souligner en vu de l’effort produit. « Dans l’appart », « Mama », « Pour les taulards », « C’est réel » sont des morceaux dans lequel nous constatons un effort d’écriture. Rien qui ne vole très haut cependant. La faiblesse reste l’adjectif maître pour qualifier un My World digne d’un benêt de classe, ce cancre à la limite de la déficience qu’on s’efforce de ne pas fustiger par pression sociale.
Indigne de sa catégorisation
Nous ne sommes pas allergiques à l’autotune, en tout cas quand elle est utilisée sciemment et avec parcimonie. Là c’est trop. Partout. Il y en a de PARTOUT et ça ne laisse refléter que d’énormes lacunes vocales techniques, déjà constatées sur un précédent Planète Rap. « Dans le futur » (peut-être un peu trop) est un excellent exemple de ce que nous essayons tant bien que mal d’exprimer. Il est respectable de vouloir tester un tas de trucs pour nuancer son projet mais encore faudrait-il que cela soit bien fait. Vraiment dommage sachant que, comme tout, ça se travaille. Les variations de flow existent et même si elles s’accordent relativement bien avec les prod’, elles sont parfois incompréhensibles et souvent gênantes.
Quelques featurings viennent agrémenter ce projet. C’est ainsi que vous retrouverez un Alonzo décevant sur « Comme d’hab », Julie Gonzalez sur « Encore des paroles », Houari sur « La Gâchette » mais encore Adeal sur « En place » ou Benjamin Mendy ainsi que Mehdi sur « Mercé ». Vous vous laisserez sûrement emporter par des titres qui tournent en boucle en radio comme « Wesh alors » ou le plus récent « Lova ». Des millions de vues à chaque titre, des certifications à chaque album, un engouement incompréhensible, nous devons l’avouer.
Le travail fourni est quand même à souligner plutôt deux fois qu’une. Déjà parce que cet album sort en full indé et parce qu’on sait que le très attachant Jul fait presque tout lui-même. Nous sommes conscients de l’engagement nécessaire à une telle réalisation. C’est honorable. Pas excusable. La forme est au diapason. Des beats qui se ressemblent presque tous, des sons pour Turn Up en discothèque ou pour tourner la nuit en voiture avec ses potes, un matriçage (ou mastering) bâclé… Des points négatifs à la pelle, un album indigne d’intérêt de la part d’un public Rap averti.
Un album d'un genre nouveau, très linéaire, qu'on pourrait qualifier de musique d'ambiance. En gros, si on entend pas les paroles, rien de grave : de toute façon, on ne comprend rien la plupart du temps... Pour une musique cataloguée comme urbaine, c'est un non. NON. Malgré tout, on sent que Jul est un jeune homme honnête, avec du vécu qui pourrait avoir tout un tas de choses intéressantes à raconter s'il ciblait son travail sur la technique. Pour les prochains albums, qui sait ? Peut-être n'aurait-il pas le succès qu'il a aujourd'hui, c'est vrai. Avec de telles faiblesses, c'est que le buzz ne durera qu'un temps.
[A LIRE SUR HYPE SOUL]