L'Impératrice est une formation assez fascinante, une des plus originales de la scène pop actuelle en France. J'ai déjà chroniqué leur deux albums, Matahari et TakoTsubo, mais il ne faut pas oublier où tout a commencer, en 2015, lors de la sortie de cet EP, Odyssée.
Enfin, où tout a commencé, L'Impératrice est née en 2012, avec la sortie d'un premier EP, éponyme et instrumental, très influencé par Daft Punk et l'électro, puis remet le couvert en 2014 avec SonatePacifique, terriblement beau, notamment grâce à la chanson-titre, agrémentée par les interventions vocales d' Isaac Delusion, un vieux pote de Charles de Boisseguin, ancien journaliste devenu leader du groupe. L'Impé se fait peu à peu un nom dans le milieu underground parisien, elle est alors composée de Charles, aux claviers, de Hagni Gwon, aux claviers également, de David Gaugué à la basse, de Tom Daveau à la batterie et de Martin Neumann à la guitare.
Cependant, un renouveau fort intervient, en la personne de Flore Benguigui, à l'origine chanteuse de jazz, apportant une touche légère et poétique aux instrumentaux de l'Impératrice. Leur premier travail ensemble est celui-ci: Odyssée, six titres, 21 minutes, d'une pureté musicale et poétique absolue.
Selon les notes de pochette, l'EP narre "l'histoire de Théodora, une impératrice byzantine, une courtisane et une danseuse ensorcelante, et qui amène sa troupe avec elle dans un long périple décadent". Quel programme, un mix entre l'Antiquité et la modernité, car l'Impé ne fait pas dans le classique, bienvenue donc aux nappes de synthés, à la basse groovy, et aux fûts disco, aussi à la guitare funky que Nile Rodgers ne renierait sans doute pas, et cela tout en restant d'une élégance certaine. Cependant, le plus bel instrument dont dispose le groupe est sans nul doute la voix de Flore, glissant avec volupté et sensualité légère sur les textes qu'elle à élaboré avec Charles.
Car, si vous ne l'aviez pas compris, Odyssée est un "concept-EP" (expression maison). Nous sommes accueillis par les synthés gonflés du titre "Le Départ", véritable invitation au voyage (mais je pense que c'était le but).
Arrive ensuite le joyau du disque, "Agitations Tropicales". Cette chanson luxuriante parle d'une "partouze dans la jungle" selon son co-écrivain Charles de Boisseguin. Il est difficile de ne pas être séduit par cette mélodie, et par l'élégance de la voix de Flore.
L'Impé s'essaie ensuite à l'anglais sur le très réussi "Parfum Thérémine", à la guitare tournoyante et à la rythmique légère mais implacable. Sans hésitation, c'est un morceau marquant.
"Odyssée", exemple de space-pop mêlé au disco-funk de l'Impératrice, est aussi une réussite, montrant avec distinction qu'un instrumental peut être aussi efficace qu'un titre chanté.
En parlant de chanter, arrive la deuxième splendeur de l'EP, où Flore nous entraîne dans ses envolées vocales, "La Lune", aux boucles de synthés étourdissantes, a l'apparence du calme avant la tempête. En un mot (ou deux), c'est magnifique.
Mais "Epilogue" nous ramène à la réalité, nous montrant que, comme tout, ce voyage a une fin. Ce morceau très calme et aérien symbolise la redescente, après un trip exceptionnel. En 21 minutes, c'est une belle performance.
Odyssée, c'est un peu comme de ces rêves dont on n'a pas envie de sortir, pestant inlassablement et inutilement contre le réveil qui sonne. On aurait aimé ne jamais en sortir, pouvoir se balader dans cette jungle cosmique et chaude pour l'éternité. C'est ce qui lui vaut cette note exceptionnelle: 10/10. C'est pratiquement la perfection, mais si rien n'est jamais parfait. Comme quoi, il faut parfois savoir faire court ...
L'Impératrice a trouvé sa forme actuelle. Neumann quitte le groupe, remplacé par le tout autant talentueux et sympathique Achille Trocellier. Ils sortent "Vanille-Fraise" en 2016, succès commercial qui coïncide avec leur signature chez le label indépendant microqlima. Après le très bon EP Séquences de 2017 , la sortie du premier album Matahari fait rentrer l'Impératrice dans la cour des grands, comme nous l'avons déjà vu. Ils sont là, et ils restent, pour notre plus grand plaisir.
Odyssée, perfection onirique et tropicale.
"Le Départ"
"Agitations Tropicales"
"Parfum Thérémine"
"Odyssée"
"La Lune"
"Epilogue"
Lien vers ma chronique de Matahari, le premier album
Lien vers ma chronique de TakoTsubo, le deuxième album :)