Tout le monde sait... que depuis son retour fulgurant sur les scènes du monde entier, Leonard Cohen est au zénith, absolument inatteignable par quelque autre artiste, musicien, compositeur actuel. On n'espérait pourtant plus un "grand" album de sa part, comblés que nous étions par cet interminable "relevé des compteurs" auquel s'affairait le vieux grigou : "Old Ideas" arrive comme un coup de foudre inattendu, et nous voilà repartis pour 20 ans avec cette blessure sanglante à l'âme, cette blessure chérie que seul Cohen sait nous infliger avec autant de cruauté amusée et de sérénité menaçante, et ce depuis son premier album, en... 1968 ! Oh, il ne faut pas chercher de nouveautés dans "Old Ideas" (le titre, déjà, un peu cynique...), il y a au contraire beaucoup de redites ("Crazy To Love You" revisitant "Chelsea Hotel", par exemple...). Il ne faut pas non plus s'attendre à des mélodies faramineuses comme le Canadien errant en a eu tant dans sa besace, cette source là est tarie aussi... Et pourtant, pourtant, réduit au strict minimum, cet album - qui n'a rien, mais rien, d'un testament, réjouissons-nous d'imaginer qu'il y en aura d'autres... - conserve l'essentiel absolu de la magie "cohenienne" : des mots qui tuent et enchantent tour à tour ("Going Home" : quel texte ! Quelle claque !) portés par une voix de plus en plus en basse et de plus en plus touchante (on pense aux derniers albums de Johnny Cash...) et posés sur une texture musicale évanescente, évoquant avec une grâce qui jamais ne se dément folk, jazz, blues, soul, sans que le "genre" musical n'ait vraiment la moindre importance, de toute façon. [Critique écrite en 2012]