Blonde reggae

Album qui n’est pas sans originalité. Quand on voit les trois gars qui nous regardent avec leurs gentilles têtes blondes sur la pochette, on est loin de se douter de ce qui va suivre. Un punk rock viril, un rock reggae offensif, et non pas un roots-rock reggae, on n’est plus en Jamaïque ici. Le reggae en beaucoup moins syncopé, assimilé par un groupe de rock, beaucoup en ont rêvés, ils l’ont fait, à leur manière. Un ovni pur et simple, une réussite dans le genre, d’autant plus impressionnante que c’est un premier album. Evidemment il n’est pas sans défauts. Certains trouveront Hole In My Life trop long et répétitif, mais j’aime bien ce riff d’essence Hendrixien. D’autres qui ont trop entendus Roxanne à la radio, ou Can’t Stand Losing You, diront que c’est deux tubes « commerciaux », donc faciles, ce qui est assez facile à dire puisque l’album a marché. Dès qu’un album fonctionne, tout à l’air plus facile en effet. A l’époque rien ne prouve que cet objet expérimental, aux arrangements minimalistes, (punks, je dirais), une simplicité, une « pauvreté », enregistré à l’arrache, la rage de l’instant, la prise sur le vif, un côté do-it-Yourself, rien ne prouve que ça aurait marché. Et quand on l’écoute pour la première fois, ça n’a rien de commercial. Le jeune Sting à la basse, chant, chœurs. Steward Copland qui a assimilé comme personne les rythmes du reggae, si bien qu’il arrive à les ressortir dans un contexte rock, et les cocottes très funky d’Andy Summers à la guitare. Le mélange est surprenant, excitant, est les compos sont détonantes de simplicité. On aboutit à quelque chose d’inattendu, beaucoup plus acoustique dans l’esprit, que les tonnes de décibels, la grosse artillerie électrique dont les autres groupes rock de l’époque, nous avaient habitués. Ils sont à la frontière du punk mort-né, et du reggae triomphant, qui n’a pas tué le rock. Pas mal quand même ! Tout concourt à un album étonnement homogène, comme ils savaient très bien où ils allaient, à la fois juvéniles, mais avec une assurance de vieux leaders du top 50. Alors j’aime aussi So Lonely, avec le fameux : I Say lo lo lo, lo lo lo. Et cette voix si particulière de Sting. I say lo lo lo…on ne s’en lasse pas. Et le dub final Masoko Tanga qui nous replonge en pleine fièvre reggae 1980 made in UK, sans nostalgie, juste un morceau très roots. J’aime bien Be My Girl, un rock qui se transforme en poème pour Sally. Aussi riche et prometteur qu’un premier album d’un groupe d’envergure puisse l’être.