La fête, c'est tout ce qui nous reste !

Cet album, "Overdose", du groupe emblématique d'anarcho-punk français Les Sales Majestés, sort en 2019 après plusieurs années de recherche de style. En effet, le chanteur depuis les années 80, Arnaud, quitte le groupe en 2014, laissant Yves, son jumeau, au chant. Deux albums sortent en 2015 et 2017 ("Ni dieu ni maître" et "Droit dans le mur") qui sont très moyens, voire mauvais. Pour moi, Overdose est la trouvaille de ce style, il est un très bon album de punk, avec un virage métal nouveau pour le groupe. Je trouve que les mélodies de l'album s'allient superbement bien avec la voix d'Yves. Cet album suit toujours le tournant pessimiste pris par le groupe depuis les années 2000, mais cette fois en l'amplifiant.

Monde de merde. Cette œuvre décrit et dénonce très bien le mandat du nouveau président Macron dans les deux premières chansons : "Macron" (sortie en 2017 à la base) et "Castaner". L'une décrivant le projet, selon eux, de la Macronie au pouvoir, un régime sécuritaire et inégalitaire en France. L'autre prouvant cette tournure à travers le personnage de Castaner (Ministre de l'Intérieur de l'époque) au moment des Gilets Jaunes avec les violences policières et la dérive sécuritaire de plus en plus voyante. Face à cette description de la France (mais en réalité du monde), peu de solutions sont chantées dans cet album, une faible chanson en soutien aux Gilets Jaunes apparait, mais sans réel entoushiasme je trouve face aux autres musiques beaucoup plus pessimistes et sombres. En effet, juste après cette musique le groupe affirme "ne plus croire en rien […] même en l'anarchie" (« Je crois en rien »), il n'y a donc aucune solution pour sauver notre monde, selon eux on est condamné à l'apocalypse. C'est une critique que je pourrai apporter en tant que militant, le fait d'offrir une vision aussi pessimiste de l'avenir ne donne pas aux gens l'envie de se bouger pour faire changer les choses, alors que c'est toujours possible si le peuple s'active ! Mais comment réellement leur en vouloir ? La modernité néolibérale et sécuritaire nous offre chaque jour la preuve que le changement est complexe car le peuple est tellement asphyxié qu'il ne se révolte pas, dès fois on peut vraiment penser qu'ils ont raison...

Fin du Monde. Comme aucune solution n'est possible pour changer notre monde, l'apocalypse est obligatoire. C'est cette affirmation qui est scandée : "L'apocalypse est pour demain / Bientôt la fin du genre Humain" dès la troisième chanson de l'album après avoir décrit notre monde dans les deux premières. La cause de cette apocalypse serait le réchauffement climatique dû au capitalisme, comme on peut le voir à travers la musique "Overdose". Face à cette affirmation monstrueuse le groupe se réfugie dans la nostalgie. On peut le voir avec la musique "Peace and love" où Les Sales Majestés reviennent sur leur espoir de jeunesse (années 80-90) pour changer le monde en un paradis terrestre anarchiste. Ils en parlent comme un temps regretté face au "No futur" chanté dans cet album sans perspective d'avenir. Mais alors, face à une affirmation de l'apocalypse inévitable, comment se réfugier, s'évader pour penser à autre chose ?

La fête comme seule échappatoire. Ma musique préférée de l'album : "Punk à gogo" offre la vision de la fête des Sales Majestés avec laquelle je suis en accord. La fête étant le seul moyen de sortir de notre quotidien morose. On a tous vécu cela, un soir festif avec des amis qui nous font oublier nos problèmes, nos idées anxieuses ou sombres, pour profiter de ce moment où la musique nous empêche de réfléchir et où l'alcool prend le dessus pour nous offrir une euphorie bien accueillie en ce moment de fête. On oublie tout : notre travail, notre condition d'exploité, pour profiter de ce moment, des gens qu'on aiment et de se déchaîner dans un pogo par exemple. Ce n'est pas une solution pour lutter contre l'apocalypse, mais c'en est une dans la mesure où on sort un instant de ce cycle infernal. Encore une fois, c'est critiquable politiquement parlant, mais avec les perspectives révolutionnaires nulles d'aujourd'hui, c'est entendable, car s'il nous reste que quelques années à vivre, autant les réaliser en fête...

En conclusion, cette œuvre est réellement critiquable politiquement dans les perspectives futures qu'elle offre, mais c'est une possibilité décrite : que rien ne change, que le peuple continue dans cette voie et que seule la fête peut nous faire oublier notre fin. Mais il ne faut pas prendre cet album comme vérité absolue, le monde peut et doit changer, c'est à nous de nous bouger ! J'affirme qu’il s’agit tout de même de compositions très bonnes, que ce soit par leur qualité musicale ou par leurs propos, certes critiquables, mais assez cathartiques. Bref, "Overdose" est un très bon album.