Il y a des gens qui restent enfermé dans un milieu clos, de temps en temps ils sortent de là avec une oeuvre qui souffle tout le monde par sa force, sa beauté, sa nouveauté. Isolés pour bosser ou vivant entourés du même groupe de personnes qui savent canaliser leur énergie dans les bonnes ondes, on se demande où ils sont passés jusqu'au jour où ils réapparaissent avec un album, un film ou n'importe quoi d'autre sous le bras. Et face à leur création on sent qu'ils ont eu le bon recul sur eux même, qu'ils n'ont pas passé leur temps à renifler leur propres pets en se trouvant géniaux, telle la moufette rayée du Canada.
Les première chansons que j'ai eu à entendre de Bertrand Belin, c'était sur France Inter. Dieu sait que je peux aimer leur programmation, mais par moment un éclair de génie prend l'un des mecs aux commande de la musique et se dit que ce serait pas mal de diffuser des morceaux d'un de ses potes de beuveries. J'ignore si ça se passe comme ça mais je n'arrive pas à imaginer beaucoup de scenarios où ces chansons finissent sur les antennes. Quelques part je sais qu'il y a de l'argent publique qui a financé ça et ça me fait mal, je veux dire, il a le droit de vivre, de toucher des aides, mais putain qu'il fasse un effort. J'ignore tout de la vie de Bertrand Belin et quelques part je m'en fout mais en écoutant ses chansons je m'en fait le portrait d'un mec qui a fait les beaux arts, qui a vaguement entendu parlé de Poésie concrète au détour d'un atelier écriture. Le gars est paumé et un jour il se dit que finalement, balancer des mots piochés au pif c'est pas mal, que les claquer sur voix d'alcoolo sous prazepam c'est un peu l'avant garde quand même, avec le moins de musique possible ce serait encore mieux.
Et il a pas tord quelques part, tout le milieu intellectuel de l'entre soi se palpe allègrement l'entrejambe face à tant de beauté minimaliste. <> s'écrient-ils <> avant de s’esbaudir plus encore devant une nouvelle pirouette ultime; faire rimer boue et hiboux. Mais au fond, est ce l'écriture qui fait tout capoter ? Pas sûr, loin de là. Lisez les paroles, l'expérience est incroyablement plus agréable que lorsqu'il les annone lui même, et c'est presque bien ! (je dis presque parce qu'il a un peu tendance à faire des variations nulos autour d'une phrase, bon ça donne un thème et un rythme à un texte mais de là à répéter le procéder dans presque tous ...) Non vraiment je pense que c'est cette voix qui crame tout le reste. Cette voix à la fois grave et susurrée qui résonne dans le nez, celle des gens qui regardent de haut avec les yeux mi clos, une clope à la main et qui demandent avec la plus grand certitude <> Quand le j'en foutisme devient un accent, un style musicale. Ceux qui aiment ça l'appellent "la nonchalance" mais c'est pas le même sentiment quand j'écoute Jacques Dutronc jeune, et Bertrand Belin. Il y a aussi cette vague impression qui m'a traversé en l'écoutant, il m'a rappelé de façon lointaine Alain Bashung, mais une version Leader Price de Alain Bashung, un Bashung sans ce qui le rend bien, sans le talent.
Persona donc, un recueil de poèmes correcte mais album à éviter.