A la rentrée 2013 débarque presque incognito - presque - un disque à la pochette bleutée, mystérieuse, et au nom inconnu ou presque. Derrière ce Volcano Choir (choeur de volcan) se cache en fait Justin "Bon Iver" Vernon himself, que de toute manière on reconnaît instantanément au chant dès l'album entamé. Et Volcano Choir n'est pas non plus un groupe de débutants, puisque c'est le deuxième disque de la formation, sorte de supergroupe composé de Vernon et des membres du Collection of Colonies of Bees.
Il y a un vrai plaisir à retrouver aussi vite celui qui annonçait encore récemment la fin de Bon Iver, groupe qui a apporté un certain renouveau à la scène folk majeure nord américaine ces dernières années, et ce en deux disques, le somptueux et ramassé "For Emma, Forever Ago" et le plus ampoulé mais non moins splendide "Bon Iver, Bon Iver", adoubés par la critique US? Pitchfork en tête, et triomphal dans le reste du monde. Sur scène le bonhomme envoie du lourd, avec sa carrure de bûcheron canadien et sa voix de tête tout simplement ahurissante. Vernon avait testé des sonorités plus rock, plus orchestrales et aussi plus électroniques (vocoder et autotune) sur le dernier album de Bon Iver, et le premier constat que l'on fait est qu'il poursuit résolument dans cette voix avec Volcano Choir.
Au programme donc, 8 chansons pour 40 minutes de musique, avec un format sensiblement ramassé : presque toutes les chansons font autour de 4'40'' sauf la dernière, plus ample, et les sonorités au début du disques pourront dérouter par leur cohérence et leur grande similarité. La strucutre des premiers morceaux est ainsi sensiblement identique : une mélodie est posée, fort belle, la chanson se construit autour comme une plainte typique du travail de Vernon, puis in crescendo démarre jusqu'à un final plus épique. Une recette de pop "de stade" ambitieuse et riche qui n'est pas sans rappeler certains Coldplay, la personnalité musique de Vernon supplantant celle de Chris Martin. Exit donc l'immédiateté pop des uns, bonjour les affres torturées et souffreteuses de l'autre. La musique agit en bloc, complexe, belle, peut-être difficile d'accès aux premières écoutes.
Vers le milieu du disque, un peu de variété se fait jour : Alaskans, dont le titre évoque directement les "géographies" du dernier Bon Iver, est une ballade folk un peu étrange, où l'on retrouve un sens de l'hybridation et du bricolage électronique typique de Vernon et de ses expérimentation sonores. Ailleurs sur le disque, il chante avec un timbre inhabituellement grave, parfois fortement autotuné, pour des effets des plus saisissants. Le disque se dérobe à toute facilité et se poursuit à son rythme particulier, plaintif certes mais indéniablement puissant, jusqu'au finale grandiose et moderne de "Almanac", chanson fleuve et la plus fortement marquée par les recherches sonores de Justin Vernon sur l'album (un peu à la manière de "Beth Rest" sur Bon Iver, Bon Iver).
En somme, un disque fortement marqué du sceau de la personnalité musicale de Justin Vernon, d'une facture magnifique, ciselée, aux grands mouvements orchestraux (plus océaniques que telluriques dans mon ressenti personnel), plutôt mélancolique bien sûr. Un bon complément au disque des Dodos, dont la sobriété fait un bel effet de contraste.