Alors bon, comment dire ? Comment s'exprimer parfaitement tout en restant concise ? Taylor Swift fut pour moi un péché-mignon. De ceux dont l'on profite à l'abri du regard acerbe de la majorité. Cette majorité qui me rappelait sans cesse que ce n'était là que des chansons mièvres et stupides, construites comme toutes les autres mais qui n'avait jamais pris le temps de les écouter sincèrement.
Je pense que la musique est avant tout une affaire de sincérité. Peu importe le genre, la construction à partir du moment où ce que j'écoute à quelque chose de personnel, d'unique et que je sens que l'artiste transmet quelque chose. Bien sûr, comme tout le monde, j'ai mes préférences et pourtant je pense que penser la musique comme bonne ou mauvaise est très réducteur. C'est, à mon sens, une histoire de "ça me raconte quelque chose ou pas", "est-ce que je l'ai déjà entendu quelque part ou pas". Terriblement vague mais je tiens mon exemple.
Les premiers albums de Taylor étaient pour moi de véritables contre-pieds à l'agonie du Pop-Rock, genre qui avait dominé les charts pendant de longues décennies mais qui, à l'époque, se faisait remplacer par des sonorités plus électroniques. Et voilà que débarque ce petit bout de femme qui se décide à grimper l'échelle de la popularité avec de la Country, genre musical obscur et conspué pour son côté "vieille Amérique blanche et conservatrice". Autant vous dire que c'est un peu comme si quelqu'un tentait de remettre le yodle au goût du jour. Pourtant, ça a marché au-delà de n'importe quelles prévisions pessimistes. Pourquoi ? Tout simplement parce qu'elle transmettait une émotion. Je pense que son individualité transpirait dans ses chansons qui abordaient des thèmes très personnels comme des expériences, des questionnements, des aspirations. Prenez Rihanna à la même époque et repensez à ses débuts. En terme de genre (même si c'est une donnée discutable), elle nous faisait un bon petit R&B et après ça, du Lady Gaga parce que c'était la tendance. Alors oui, on peut dire de Taylor Swift que sa musique et ses paroles sont niaises mais: 1) c'est le principe même du Country (écoutez Tim McGraw ou Keith Urban et vous verrez qu'on est dans les thèmes récurrents et languissant de l'amour et de ses frasques). 2) Elle faisait ce qui lui plaisait et non pas la soupe générique et sans âme que n'importe quel producteur peut faire en dix minutes. C'est ce qu'on appelle dans le jargon de l'intégrité et c'est en vertu de l'intégrité artistique que je me permettrais de "détruire" celle qui a bercé tant de mes nuits sans sommeil.
Reputation amorce ce que je craignais. Personne dans le monde de la musique passe son temps à faire exactement la même chose. Il y a toujours un tournant et c'est à ce moment que certaines carrières s'élancent ou s'écrasent. Autant vous dire que je respecte cela de tout mon cœur et que malgré le fait que ses derniers albums m'ont assez déçue, j'écouterai encore les prochains.
Et pourtant, je trouve que voilà, c'est le moment du divorce artistique parce qu'au fond, si l'on aime quelqu'un pour son individualité, lorsqu'il/elle devient "comme tout le monde", c'est assez déroutant. Si j'ai bien rigolé de son featuring avec T-pain, lorsque la blague est devenue réalité, lorsqu'elle nous montre l'étendue de son flow sur Ready for it et bah, je n'étais pas "ready" et j'ai fait mes valises. Je précise que je n'ai rien contre son virage électronique j'ai adoré I knew you were trouble mais pourquoi je l'ai aimée ? Parce qu'elle se lançait dans une basse clairement "Dubstep" alors que c'était déjà "so 2012". Je le répète mais c'était unique et personnel ! Alors pour appuyer encore sur les genres, on est ici face à de la Future Bass et si vous ne savez pas ce que c'est et bien allumez la radio et tout ce qui n'est pas fait à la guitare et qui n'est pas du rap, c'est de la Future Bass. Peut-être que la "vieille Taylor est morte" (Look What You Made Do) mais bon sang, qui est donc cette personne qui donne un live au Grammy entièrement en acoustique si ce n'est elle ?
C'est dans cet album que je la trouve générique et niaise au possible que ce soit dans la musique ou dans les paroles. Mon Dieu, mon Dieu. C'est évident que la célébrité est aussi désirée que destructrice et ce, encore plus quand on a le malheur d'être une femme et de penser que l'on peut collectionner les partenaires comme les hommes (Me tapez pas c'est de l'ironie) sans se faire démonter par les tabloïds. Mais "old Taylor", elle s'en tapait le coquillage avec le doigt de l'indifférence parce qu'elle n'allait pas changer pour autant (me semblait-il alors) ni même jouer avec le stigmate. C'était à prendre ou à laisser et c'est ça qui soulignait pour moi son talent. Elle faisait à contre-courant et tant pis pour les "rageux". Oui je suis une anti-conformiste primaire qui n'aime pas que l'on succombe aux charmes de la majorité et oui, comme Levi-Strauss, je n'aime pas bien la modernité qui homogénéise les spécificités.
Je n'avais pas envie, peut-être par nostalgie parce que je suis une vieille conne de la première heure, de donner à cet album une sale note. Déjà parce que c'est très rare de noter aussi bas pour moi et puis parce que je pensais qu'il y aurait au moins une ou deux chansons qui me ferait changer d'avis. J'attends les hypothétiques versions acoustiques !