Neil Young avait scindé les années 90 de deux signatures artistiques bien distinctes : l'une clairement rock, binaire, grunge et source d'inspiration chez de nombreux groupes de la côte ouest. L'autre, beaucoup plus orageuse et progressive, où les jams et prises de risques artistiques se partagent la part du gâteau. Puis vinrent les années 2000, médiocres et étonnamment rétrogrades le temps de deux albums dont on se demande ce qu'ils foutent là. Neil Young n'est de toutes manières pas à un paradoxe près.
Neil Young n'a jamais été aussi fort que lorsqu'il trouve l'idée de génie que personne ne comprendra, on se rappelle du remarquable Trans vingt ans plus tôt. Avec ce concept album au bon goût de prairie, de corruption et de politique (l'un va avec l'autre), voire même d'imaginaire naïf, Neil Young entame sa verve pamphlétaire qu'il ne lâchera pas de sitôt, The Times faisant office de brulot reculé (éculé?) parfaitement d'actualité mais pas d'une grande inspiration artistique.
Greendale est une drôle de production, une histoire étrange contée par différents points de vue. Derrière des lyrics dont on peine à se sentir réellement concernés et par conséquent totalement transportés dans cette ville fictive, c'est un enchaînement de riffs répétitifs mid-tempo rocailleux, bluesy et électriques qui trouvent échos avec ceux de Ragged Glory et The Mirror Ball, qui donnent toute sa dimension au disque. Comparativement à sa version studio, ce live "mis en scène" en parallèle à mesure que Neil Young et le Crazy Horse déroule, s'avère encore plus brut et rugueux, joué à la quasi identique mais émaillé de quelques gimmicks live du Loner. A l'époque de sa création, Greendale semblait ne pouvoir intéresser que l'imaginaire débordant de Neil Young, mais il s'avérait finalement très attachant et passe aujourd'hui l'épreuve du temps avec brio. C'est peut-être cela, la réussite d'une formation pas techniquement irréprochable mais toujours en parfaite symbiose : ensemble, on y arrive.