Rocky, c'est certainement l'une des BO les plus connues, même inconsciemment, de l'histoire du cinéma. Son Gonna Fly Now, qui s'envole, et ce sont tous les souvenirs du film qui ressurgissent en un instant. Grâce au génie de Bill Conti, qui a contribué de manière non négligeable au succès de l'histoire de cet underdog, de ce loser magnifique, un peu gauche dans ses sentiments, fragile face à celle qu'il aime.
C'est toute cette délicatesse que Bill Conti a aussi réussi à capturer par les notes portées sur ses partitions, en plus de ce courage, de cette abnégation qui force à rester debout malgré les difficultés, et dont Gonna Fly Now est sans doute le plus emblématique. Les premières notes résonnent et l'on revoit immédiatement le boxeur à l'entraînement, en train de courir, accompagné par son chien, ou gravir les mythiques marches du Philadelphia Museum of Art. Ce sont aussi ses poings fermés, levés, rageurs, comme un défi lancé aux puissants. Comme une revanche de l'humble qui est bien décidé à ne pas laisser passer sa chance. Tandis que le choeur du morceau exalte l'effort, la sueur et la souffrance dans une envolée qui a le don de filer systématiquement les larmes aux yeux.
Cette BO, au delà du film sportif attendu, épouse le chemin emprunté par son héros clairement identifié à son interprète qui, comme lui, cherche à sortir du misérable. Elle a su en traduire et magnifier les enjeux de l'intime. La douleur du corps que l'on brutalise à force de frapper des carcasses congelées jusqu'à en saigner et en avoir mal, ce coeur débordé et attendri des sentiments dont des morceaux comme Adrian ou Rocky's Reward sont irrigués.
Ce Best of Rocky, c'est aussi la solitude sur le ring, sur fond d'images en noir et blanc qui viennent aussitôt à l'esprit, jouée au piano de la manière la plus simple, peut être aussi la plus touchante, en ralentissant à l'extrême le tempo du thème principal.
Mais le meilleur de l'album, finalement, pourrait être atteint par le medley Overture, débutant par cette fanfare tonitruante, s'assagissant par la suite, pour déployer, sur un fond de folles percussions au tempo devenu frénétique, des sommets d'émotions insoupçonnées dans une tourmente étourdissante à nulle autre pareille.
Figurent aussi sur le CD toutes ces chansons qui ont fait la légende des différentes suites de la franchise, liées pour l'éternité aux images qu'elles ont portées de l'univers de l'étalon italien, des coups du sort le laissant au fond du trou, de ses rivalités exacerbées devenues mythiques. Si certains esprits chagrins les considéreront sans doute datées et passablement ringardes, force est de constater que Eye of the Tiger, Burning Heart ou encore No Easy Way Out ont traversé les époques, résistant aux reprises et autres références plus ou moins bien inspirées de la jeune garde.
Tout cela fait de ce Best of Rocky l'une des BO les plus abouties, Bill Conti se hissant, en une seule composition, à la hauteur de certaines musiques immortelles telles que celles de Star Wars, E.T. L'Extra-Terrestre ou encore Blade Runner. De celles qui ont tout simplement marqué leur époque. Bill Conti aura par ailleurs accompli l'exploit de s'imposer non pas à coups de poings, mais en touchant au coeur en parlant, avec de simples notes, des plus humbles et du triomphe d'une volonté invincible.
Behind_the_Mask, boxing day.