Après plusieurs albums de bonnes qualités mais qui peinent à se faire remarquer au milieu des Rolling Stones et des Beatles, The Pretty Things mettent les bouchés doubles en 1968, avec S.F. Sorrow, un album concept ultra travaillé. Le concept c'est quoi? C'est retracer la vie d'un certain Sebastian Sorrow, du berceau au linceul, quelques mois avant "Tommy" des Who, mais quelques mois après "Days of Future Passed" des Moody Blues, album sur le même principe mais plus métaphorique.
Rien ne va pour le pauvre Sorrow, sur le point de se marier il est mobilisé dans l'armée. "Private Sorrow" qui relate cet épisode est une des plus belle chanson de l'album, grâce à un rythme guerrier et entrainant qui rappelle "Johnny s'en va-t'en guerre" et des paroles très dures mais poétiques. Sorrow perd ensuite sa fiancée dans l'incendie d'un dirigeable relaté dans "This Balloon Burning" dont le rythme énergique des guitares symbolise la détresse. Je ne vais pas toutes les faire une par une mais je voudrais mentionner l'onirisme psychédélique de "Baron Saturday", et le blues très rock de "Old Man Going" qui rappelle le style de Pretty Things à leur début.
C'est sans doute le gros défaut de l'album, il n'apporte rien de nouveau. Pendant que les Beatles, les Rolling Stones, les Pink Floyd ou Led Zeppelin inventent le rock progressif ou le metal, The Pretty Things ne fait que reprendre le style de Sargent Pepper (c'est caricatural). L'exercice est merveilleusement réalisé, le mélange des genres est réussi, et peu de titre sont en dessous du niveau global de l'album situé très haut. S.F. Sorrow n'est pas passé loin (à un grand tube) d'écrire l'histoire du rock, au lieu de ça il est injustement tombé dans l'oubli. Il est temps de le (re)découvrir si ce n'est déjà fait.