C’est vrai, je l’avoue. Je me suis fait avoir par le regard de braise de Toni. Je me demandais surtout, comment elle avait fait pour ne pas me marquer plus que ça avec une voix pareille ? Et dès les premières notes, je sais. Cette sensation de froid rythme, ce tempo de montre-bracelet, cette mécanique suisse, ces arrangements très école de musique BCBG, décoratifs la plupart du temps. C’est du Babyface. Aïe ! Come On Over Here. You’re Making Me High. Evidemment, ça a marché. Je me rappelle du tube qui passait tout le temps à la radio. Techniquement irréprochable, voix en or, chanteuse serrée dans un bloc de congélation. Ça sonne propre lisse, et glamoureux, tout le temps. Tout ça n’aide pas à situer les mélodies, qui se perdent en route, entre la bonne dose de reverb, et les chœurs qui sonnent comme dans un tunnel rempli d’écho. Toute la musique afro-américaine que je n’aime pas, et que j’ai supportée comme tout le monde qui n’avait pas internet. (Album de 1996).
Le langoureux, There’s No Me Without You, n’y changera rien à l’affaire. Même avec son cliché riff de guitare acoustique, et ses violons dosés au millimètre carré, en dirait un plan du cadastre. Il est chiant, Babyface. Ça sent trop le calcul, pour m’émouvoir. Et pourtant…il y a des choses qui restent. Unbreak My Heart. Le tube, le vrai. Le seul que j’écouterai avec plaisir dans dix ans. Superbe. Heureusement, on a jeté les chœurs, les fioritures, on a laissé Toni seule aux commandes, devant. Et c’est génial. Et alors même que les chœurs entrent en scène, alors que sa voix se déchire, on est vraiment dans quelque chose. Bravo, Babyface ! (J’rigole). A part ce coup de bol, le reste m’ennuie. Ça redevient la musique d’ambiance pour nanas amoureuses, ou en chagrin d’amour. A écouter par curiosité seulement.
La RnB, dans toute sa gloire. Ça ne décolle jamais, normal, c’est fait pour ça. De la variet, dans le sens commun du terme. Qui arrive, sacrilège ultime, à tuer toute la Soul de la voix de la diva. Toni surnage sans difficultés, mais on ne lui donne pas beaucoup de choses à manger. Find A Man. Let It Flow. Ça me dit un truc, ça…
Tube radio, lui aussi. J’aime cet intro à la guitare acoustique, qui fait à lui tout seul tout le morceau. N’empêche que le reste traîne. 4 à 5 minutes par morceau, c’est long. I Don’t Want. Le type même de chansonnette bleu-rose que je déteste. Rien que le tempo amorphe me donne de l’énervement. J’aime bien Toni, mais je crois que je vais arrêter là. Comme quoi, une production luxueuse, peut arriver à « castrer » une voix en or.
J’aime pas cet album, mais je vais le garder. On ne sait jamais. Si un jour j’ai une nana à la maison, et qu’elle prend du temps à se décider. C’est le genre de musique pour filles qui peut débloquer la situation. La mettre dans un état d’engourdissement, qu’elle oublie tout, baisse la garde, oublie toute résistance…Hé ! Hé ! Hé ! Et moi, de conclure. Et bien c’est fait. Allez ! 5. Rien que pour ça, 5. Sinon c’est 4, et encore, un 4 gentil. Le regard de braise de Toni…