Pourquoi 10/10 ? Parce que Six Degrees of Inner Turbulence !
Vous le comprenez sans doute, je parle là du morceau qui a donné son titre au double album, longue piste de 42 minutes qui remplit à elle seule le deuxième CD. Une piste ambitieuse, subdivisée en 8 parties, et placée sous le signe de la folie, puisqu’elle nous raconte tour à tour les histoires et les perceptions de six individus atteints de divers troubles mentaux. Un morceau vraiment abouti, qui m’a littéralement transporté, et qui aura brassé en moi nombre d’émotions face à ces six pauvres âmes prisonnières de leur esprit tourmenté.
C’est avec une première partie instrumentale que commence cet album, une orchestration de maître, parfaite, qui m’a rappelé, non sans surprise, certaines mélodies entendues dans les jeux de mon enfance comme Final Fantasy. Coup du hasard ? Probablement, toujours est-il que ce début aux airs familiers m’a empli d’une profonde nostalgie propice à l’émerveillement. En à peine quelques secondes, Six Degrees of Inner Turbulence a capté toute mon attention, m’a littéralement piégé, et ce n’est que 40 minutes plus tard que le gong final devait signer mon retour à la réalité, avec ce simple mot à la bouche : « Woh ! »
Transcendé dès la première écoute, j’ai éprouvé pour cet album un amour irrationnel avant même de l’approfondir. Et en faisant par la suite ce travail de recul, d’analyse, je n’ai pu qu’être conforté dans ma première impression. La musique fait sens, toujours juste, virtuose, mais jamais plus que nécessaire. Les paroles aussi font sens, parvenant à trouver des images percutantes pour retranscrire les émotions des personnages atteints de divers troubles. L’un est bipolaire, voilà qu’un chant plein d’énergie mais empli d’une certaine détresse se fait entendre, l’autre est schizophrène, place à des percussions violentes et chaotiques qui brisent constamment la mélodie, puis vient la dépression, apportant un calme grave et mélancolique évoquant le souvenir d’un passé révolu. Tout est travaillé, cohérent, les rythmes s’enchainent, les transitions sont pertinentes et les mélodies variées. Un morceau splendide, à prendre comme un tout.
Voilà c’est dit, pour moi, la deuxième partie de ce double album est un sans faute, une pépite dont j’ai arrêté de compter le nombre d’écoutes depuis un moment déjà. Mais comme rien n’est parfait, je devais bien trouver quelques défauts dans le premier CD qui livre une facette plus expérimentale du groupe, facette à laquelle je suis moins sensible. Les cinq morceaux qui s’y trouvent m’ont globalement plu mais dans une moindre mesure. The Glass Prison et Misunderstood sortent largement du lot, toutes deux très réussies, promettant respectivement une entrée en matière agressive et une ballade progressive mémorables. Les autres morceaux m’ont laissé plus dubitatifs, car, bien qu’intéressants dans leur fond, j’ai moyennement accroché aux sonorités atonales et à la voix modifiée de Disappear, aux nombreux dialogues de The Great Debate ou au solo final de Misunderstood. L’ensemble n’en devient pas mauvais pour autant, mais à chacun sa sensibilité comme on dit.
Difficile donc de noter correctement SDoIT. Comment procéder ? Effectuer une moyenne des deux albums ? Bof. Elle ne serait représentative de mon ressenti sur aucun des deux. Je m’arrête donc volontairement sur ce 10/10 qui vient du cœur, en précisant qu’il s’agit de mon expérience du second CD, même si le premier m’aura moins marqué.
Après le mastodonte qu’était Scenes From A Memory, on pouvait se poser la question suivante : Dream Theater parviendrait-il à réitérer l’exploit du précédent album, ou n’était-ce qu’un succès éphémère ? De mon point de vue, que l’on parle de la musique, des paroles ou même de son concept, Six Degrees of Inner Turbulence possède des qualités objectives incontestables. Quant à savoir s’il est réellement meilleur que son ainé, la comparaison m’apparait un peu vaine, puisque tout autant abouti, il ne s’agira finalement que d’une histoire de goûts. Et pour ma part, le défi a été relevé avec succès.