Sometimes I Wish We Were an Eagle par Chro
Par Florian Caschera
On se souvient de la pétoche teintée d'excitation provoquée par la découverte des premiers bricolages sonores de Smog, tout en greffes aberrantes, à la fois criards et atones, de l'humour Beckettien qu'on a cru déceler dans les imprécations de ce drôle de type et les effets de distanciation quasi-brechtienne qui parfois suffirent à le faire passer pour autiste, mal aimable et moitié coucou. Son espèce de pop pas glop et post-nucléaire, sans perspective ni arrière-plan, terreur brute et rire inquiet, tout ça de sale, tout ça de beau et d'indéchiffrable nous marqua plus que de raison, fit qu'on s'enticha sans mesure. Nous n'eûmes pas tort.
Avec les années, les disques de Smog se chargèrent d'une électricité toujours plus mauvaise en même temps qu'elles se compliquèrent de science nouvelle (des Jim O'Rourke et cie rôdant par là, nous entendîmes plus clairement débris de krautrock, symphonies minimalistes et relents velvetiens, traverser comme autant de commentaires amoureux le songwriting boucané du chicagoan). Ces chansons neuves, indubitablement chercheuses, n'en provoquaient pas moins le même émoi primitif que les plus ancestrales ballades appalachiennes (ou que ces blues préhistoriques que l'on écoute aujourd'hui encore pour tâcher d'en apprendre plus long sur la mathématique des peurs et du fou rire paradoxal, sur le mystère en soi et le sexe sale). Plus le temps passait, plus Callahan s'affirmait comme un auteur de haut vol, un compositeur atypique doublé d'un chanteur majuscule (ce baryton toujours plus profond, creusé jusqu'aux cimes). Derrière l'artiste brut respirait l'un des grands modernes naturels de notre siècle finissant. Nous l'avions enfin compris (même si après tout, on s'en fout). (...)
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