Je devrais en toute logique adorer "Songs of Praise", le menu dégustation du nouveau restaurant Shame, composé de plats bien épicés qui contiennent tous les ingrédients que j'aime : un bon esprit de rébellion contre la critique gastronomique institutionnelle, des références punks / post punks qui activent mes glandes salivaires (des grands chefs étoilés The Clash aux rois de la nouvelle cuisine The Stranglers, en passant par les recettes cryptiques de Joy D ou des Ruts), et surtout, surtout, une intensité suffocante qui transcende la simple énergie "mécanique" et qui donne vraiment envie d'aller voir l'équipe de Shame s'affairer aux fourneaux, où l'on sent bien que tout cela va prendre un sens inédit et sûrement "supérieur"...
Pourtant, malgré le brio de l'équipe en cuisine, quelque chose ne passe pas bien, la digestion est difficile (les plats sont trop riches, trop lourds...), l'arrière-goût indéfinissable et le souvenir qu'on en garde tout sauf inoubliable. Non, les cuisiniers de Shame manquent par trop d'inspiration et se contentent d'aligner les effets immédiatement chatoyants pour les papilles, l'intensité servant finalement de cache misère à leur manque d'imagination.
Bref, en sortant de ce restaurant tellement à la mode en ce moment, si on a l'estomac bien lesté, on ne se souviendra déjà plus de ce qu'on y a mangé !
[Critique écrite en 2018]