Il est intéressant cet Offspring, car il arrive directement après 2 albums ("Americana" et "Conspiracy of one") qui ont cartonné et dans lesquels ils ont donné la pleine mesure de la qualité de leur pop-punk / punk mélo. Le genre était encore au sommet mais forcément le soufflet n'allait pas tarder à redescendre et deux choix s'offraient à eux pour "Splinter" : persévérer, quitte à mourir en même temps que le genre, ou évoluer, quitte à se mettre une partie de leur fan-base à dos. Le choix pris par le groupe... a été de ne pas choisir.
Dans "Splinter", on trouve des morceaux punk mélo dans la veine de leurs albums précédents, parfois plutôt inspirés ("The noose", "Can't get my head around you", "Never gonna find me") et idéalement mis en valeur par les mélodies, les vrais bons refrains, les riff de Noodles et le chant si particulier de Dexter Holland, et parfois un peu mou du genou ("Long way home", "Race against myself"). Mais on trouve également quelques morceaux plus originaux, qui ne sont pas signes d'une réelle évolution musicale globale et cohérente, plutôt des touches d'expérimentations par ci par là. Un peu comme si le groupe avait dit "tiens on va faire un morceau d'intro pour ouvrir le concert comme si on était dans un stade (le passable "Neocon"), et là on va faire un morceau ska (le très fun "Worst hangover ever"), puis un morceau punk rock coup de boule où on va lâcher les chevaux (le dément "Da hui") et une chanson pop où on va sortir les grattes sèches (l'excellent "Spare me the details"), en finissant sur une blague (le surprenemment crédible "When you're in prison"). En revanche il y a une constante chez Offspring, le single purement pop et quasiment humoristique censé tourner en boucle dans les radios. Pour "Americana" c'était le tube "Pretty fly", sur "Conspiracy of one" le moins inspiré "Original prankster", et ici c'est "Hit that". A chaque fois des sonorités originales, comme du clavier et un état d'esprit très léger. Ici "Hit that" a le mérite d'être assez catchy sans oublier d'être pêchu, et perso j'aime bien.
Pour résumer, j'aime bien les morceaux Offspring pur beurre, mais j'aime bien aussi les espèces de variations et de tentatives qu'ils ont fait, aussi diverses soient elles aucune n'est vraiment ratée à mes yeux. Cependant en agissant de la sorte et en balançant quelques expérimentations sans réelle cohérence et sans assumer un virage musical total et global, ils entraînent leur musique vers quelque chose de très désincarné et ils perdent un peu de leurs forces et de leur identité. C'est paradoxal, parce que même si j'aime vraiment bien cet album, il correspond également au moment où ils ont perdu leur personnalité et aux premiers pas du groupe vers un anonymat duquel ils ne sortiront probablement plus jamais.