Si j'te dis Funk, ça te parle ?
Ne viens pas me parler de l'autre roots en plastoc de Christophe Maé et ses cordes vocales maudites ou de l'autre rouquemoute de Sinclair qui est aussi Funk que "Le Petit Vin Blanc" entonné par Tonton Marcel le jour de la fête à la saucisse de ton village.
Ne viens pas non plus me raconter que les bobos Versaillais qui planquent leurs gueules de puceaux de quarante piges sous des masques de Transformers doré tout ridicule se trimbalent avec un Funk "poutre apparente" de vingt cinq bons centimètres dans les rues de New York, alors que ce n'est qu'un petit Disco inoffensif en demi-molle.
C'est pas de ça que je viens te causer.
C'est de Funk qu'on va causer. Du "qui colle aux doigts", du "qui pue la sueur" (Traduction littérale du mot "Funk".).
De la coupe Afro, des lunettes King Size et des chaussures à paillettes démesurées pour l'image d'Epinal, pour la frime. Mais la vérité elle est là : Des grattes tendues comme les culottes de ces choristes ébènes aux voix célestes, une basse qui bouffe l'espace et fait vibrer ton Mojo à t'en faire tomber le slibard aux chevilles, et des cuivres rutilants criant les notes les plus aigues du répertoire.
Bienvenu dans la musique du calbar frétillant, bienvenu dans la moiteur sexuelle.
Une musique comme cette goutte de sueur brûlante parcourant lentement ton échine frissonnante pour finir sa course vicieuse dans la raie de tes fesses. Le chemin tout tracé de l'émotion jusqu'à l'érection.
Bienvenu dans le Funk.
Et dans ce domaine puissamment volcanique et hautement érogène, Sly and the Family Stone a su briller au firmament d'un style qu'ils ont largement contribué à créer et à étoffer.
C'est en 1969 que sort Stand! dans les bacs. Le groupe tourne déjà depuis quelques années sous diverses formes et commence à faire parler de lui lors de performances scéniques fiévreuses et bariolées.
Mais Stand! va changer la donne de ce collectif métissé et survolté.
San Francisco sous acides voit naître cette grande famille musicale que va créer le turbulent Sly Stone (Sylvester Stewart) avec l'aide de membres de sa vraie famille (Freddie et Rose Stone) et quelques potes géniaux dont l'immense Larry Graham, bassiste inspiré et père du "Slap" ( Technique qui offrira de nombreuses possibilités musicales aux bassistes et leur permettra de moins se faire chier en concert et de ne plus s'endormir sur leur ligne de basse simpliste.) qui viendra enrichir encore un peu plus la musique ouverte aux quatre vents du grand Sly.
C'est donc avec un groupe de ziquos rompus à l'exercice et une expérience de la scène solide que l'album voit le jour.
C'est la claque !
Le premier morceau Stand! ouvre en grand les portes de la maison Stone et l'on comprend rapidement que le Funk "Stonien" va s'éloigner dangereusement de ses bases.
Sly ne nous prend pas en traître et annonce le programme d'emblée, claironnant clairement son ambition en voulant nous emmener encore plus haut (I Want To Take You Higher).
Comme son band bigarré, l'un des premiers à être sexuellement et ethniquement mixte, Sly fusionne son Funk Noir avec les différents courants musicaux de ces sixties foisonnantes.
Pop, Rock, Psychédélisme outré, Jazz, la fusion opère à merveille et marque à l'encre indélébile les styles qu'elle traverse devenant une influence majeure pour les années à venir. (Le Hip-Hop Notamment et les gimmicks "Stoniens" samplés par dizaines)
Les expérimentations musicales sont nombreuses et réussies.
Wah-Wah branchée sur le micro de Sly sur la monstrueuse Don't Call Me Nigger, Whitey, Re-recording intelligent étoffant encore plus la densité musicale d'un groupe qui n'en manquait pourtant pas...
Le groupe après quatre albums explosent à la gueule d'une Amérique encore optimiste et pleine d'illusions avec ce Stand!, qui comme son nom l'indique veut foutre tout le monde debout pour la communion chamarrée et bruyante d'une humanité une et indivisible.
Sly clôt les sixties dans l'espoir.
L'espoir de voir une Amérique à l'image de sa Family Stone: Mixte, métissée, généreuse et heureuse.
Mais comme l'Amérique, le réveil des seventies s’avérera plus compliqué.
Les utopies, les idéaux sont restés à la traîne et la Funk coloré et solaire de Sly va s'assombrir dans une lente descente, une lancinante dépression qui la mènera (ainsi que son leader) dans la brutale réalité des années 70.
Mais ça c'est une autre histoire.
...There's a Riot Goin' On...
La suite...
Everyday People