Rise.
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le 20 oct. 2016
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Nouveau chapitre, nouvelle page pour Kacey Musgraves. Celle qui avait chanté les joies et l'émerveillement de l'amour épaulée par une country-pop psychédélique du plus bel effet sur Golden Hour s'est retrouvée, une fois les paillettes dissipées, au centre d'un tourment personnel – ou plutôt "une tragédie" comme elle le présenterait. "I've been to hell and back/Golden hour faded black" déclare l'artiste américaine sur "what doesn't kill me", une des pistes les plus pop et les plus directes de son nouvel album. La vie lui a dérobé son bonheur suprême, le ton a changé, mais la démarche pas tellement.
star-crossed est un projet ambitieux qui ne tombe pas dans la facilité de recréer un Golden Hour – cela aurait été de toutes façons impossible – et embrasse l'éclat de la musique pop de façon beaucoup plus évidente que son prédécesseur. La plume de la musicienne texane reste, malgré tous ces bouleversements personnels, intacte et ne donne pas dans la surenchère, même si le concept de son quatrième disque pourrait la forcer à en "faire plus".
Album de divorce qui cherche à relater cet épisode de la vie de Kacey Musgraves dans l'ordre chronologique, des premiers doutes à l'espoir retrouvé, star-crossed est une œuvre dont la palette émotionnelle est beaucoup plus large et complexe que celle de l'opus précédent. D'emblée, face à une telle promesse, l'écriture peut sembler moins recherchée qu'elle ne pourrait l'être et manquer de piment. Mais la force de Kacey Musgraves n'a jamais été d'utiliser un lexique riche et d'imaginer des métaphores poétiques pour décrire des sentiments indescriptibles. Pas de grandes envolées lyriques pour parler du déchirement causé par cette séparation ici, ni de morceaux de vengeance furieux ("breadwinner", qui s'apparente le plus à ce type de chanson de rupture, reste mesuré et teinté d'humour) ou de textes à l'honnêteté brutale où l'auteure se confie sans aucun filtre.
La qualité de Kacey Musgraves en tant qu'auteure-compositrice est directement liée à son talent vocal et réside dans sa capacité à transformer des phrases qui pourraient sembler clichées ou banales dans la bouche d'autres interprètes ("There is a light at the end of the tunnel" ou "Keep lookin' up, don't let the world bring you down" pour puiser deux exemples directement dans ce disque) en des paroles qui résonnent chez l'auditeur, comme si elle cherchait à en révéler toute leur vérité et leur profondeur qui en surface ne semble pas évidente. C'est cette simplicité dans l'écriture – puis l'interprétation – qui la rend touchante et marquante.
"camera roll" est un morceau qui illustre bien la façon avec laquelle Kacey Musgraves réussit à écrire des chansons personnelles et leur donner un caractère universel pour impliquer l'auditeur et le renvoyer à lui-même. L'artiste parcourt l'album photo de son téléphone – une action que l'on a tous effectuée à un moment ou un autre – et décrit de façon explicite, sans rancœur mais avec un pincement au cœur, ce qu'elle ressent face à tous ces souvenirs appartenant à sa "vie d'avant" ("All the best, that's all that's left/Cruel evidence, it does me no favors").
Sur star-crossed, Kacey Musgraves s'illustre au sein d'un univers musical encore plus étoffé que par le passé. Même si ce n'est pas l'utilisation la plus courante de cet adjectif, on pourrait dire qu'il s'agit ici de l'album le plus "expérimental" de Kacey Musgraves musicalement. Elle navigue entre la country qui est son ADN ("justified", "keep lookin up", "hookup scene"), une pop acidulée à la légèreté séduisante ("simple times", "cherry blossom", "breadwinner"), une flûte jazzy inattendue ("there is a light"), une dose d'autotune psychédélique ("good wife"), une reprise hallucinée et inspirée du "gracias a la vida" de Violeta Parra et une guitare acoustique à l'accent hispanique ("star-crossed"). Autant de détails qui font de ce quatrième opus un disque riche et excitant ainsi qu'une belle évolution de la musique de Kacey Musgraves.
Si musicalement star-crossed voit les choses en grand, la promesse d'une "tragédie en trois actes" n'y est pas entièrement honorée. L'album se révèle beaucoup moins mélodramatique qu'il n'aurait pu l'être, choisissant de faire les choses en douceur plutôt que d'être un coup de poing. Tout comme Golden Hour n'était pas une thèse sociologique sur les joies maritales, "star-crossed" n'est pas une analyse en profondeur du divorce et c'est en réalité pour le mieux. Car c'est une fois libérée de toutes attentes inatteignables que star-crossed s'écoute et se savoure pour ce qu'il est : l'un des meilleurs albums pop de 2021.
Score : 8.2
Key tracks : "camera roll", "keep lookin' up", "simple times"
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Créée
le 16 janv. 2022
Critique lue 73 fois
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