Alors qu'elle nous avait livré quinze albums en vingt ans, il aura fallut quatre ans – soit le délai le plus long à ce jour entre deux sorties d'albums – pour que Natacha Atlas nous permette de l'entendre nous interpréter de nouveaux titres à son répertoire, avec « Strange days », son seizième et tout nouvel opus, sorti ce 4 octobre 2019.
Une fois de plus, c'est en métissant les genres musicaux que Natacha Atlas nous envoûte, nous embarquant dans un monde de sonorités jazz dans l'esprit des productions de la décennie 1960 de la mythique maison de disque états-unienne « Blue note » (afin de lui souhaiter un bon 80ème anniversaire?), qui produisit des artistes immortels comme Sydney Bechett, John Coltrane, Thelonious Monk, et dans la suavité musicale du monde arabe.
De ses origines si diversifiées (née en Belgique d'un père juif séfarade marocain ayant grandi en Etypte, et d'une mère juive ashkenaze anglaise et finalement convertie à l'islam depuis 2006, pour la spiritualité soufi), Natacha Atlas a fait, de ce retissage, l'ADN de son art, n'ayant jamais cessé de provoquer des naissances musicales heureuses, dont celle de la musique orientale avec les les paroles de « Mon amie la rose », standard français des années 1960, interprétée par Françoise Hardy, et qui lui vaudra une « victoire de la musique », en 1999.
Avec ce nouvel album, « Strange days », c'est le summum du métissage des cultures auquel est arrivé Natacha Atlas, en vingt-quatre ans de carrière solo. Les dix titres qui composent cet opus, interprétés, pour les uns en arabe, pour les autres en anglais (dont une reprise de « It's a man's world », de James Brown) ayant été, de surcroît, enregistrés entre le Royaume-Uni, la France et le Brésil. Ajoutez à cela le « featuring » de la chanteuse anglaise de « soul music », Joss Stone, qui comptabilise plus de onze millions d'albums vendus, en seize ans de carrière, ainsi qu'un « featuring » avec Tanya Wells, chanteuse anglo-suisse, bien connu comme artiste de musique alternative et de musique « indé », interprète, également, de Ghazal « poème d'amour, originaire de la culture perse), et vous bouclez la démonstration de la diversité de cet album unique.
Et si cette perle musicale qu'est l'album « Strange days », a été encensé par les professionnels du monde musical, c'est bien parce que, Natacha Atlas, en magicienne du métissage qu'elle est, a su trouver ce qui uni le jazz et la musique arabe. D'ailleurs, elle l'a déclaré elle-même par ces mots : « Les bases de la musique jazz et de la musique arabe ont des similitudes qui sont souvent méconnues et inexplorées. Mon intention artistique est de traiter ces deux identités musicales comme des symboles de différence culturelle et de créer une œuvre où elle se juxtaposent de manière à mettre en évidence l'accord harmonieux possible entre deux entités apparemment différentes ».
Ouvre aboutie dans tous les sens du terme, « Strange days » est, vous le comprenez bien, l'un des albums incontournables de cette année 2019 et qui fera date, non seulement dans la carrière de la diva de la musique arabe qu'est Natacha Atlas, mais également, mais dans chacun des deux styles musicaux qu'elle a su, si bien, réunir, ici.
Christian Estevez