De la blanche colombe au diamant noir.

Marianne Faithfull. L'histoire est connue : égérie des sixties, belle voix, sort quelques disques charmants, sombre dans la drogue après s'être acoquinée avec Jagger et ses Stones. Brisée, elle tente pendant 17 ans de s'en sortir. En 79, profitant d'une éclaircie, elle publie un album sombre et fort, Broken English, mais ce n'est qu'avec le présent Strange Weather, paru 8 ans plus tard, qu'elle émergera de l'héroïne qui ruina sa vie. Oeuvre fragile, magique où elle s'approprie et magnifie les titres d'autres grands du circuit.


De sa voix amère de fumeuse invétérée, Lady Marianne brasse de sombres paysages, passant à travers les styles qui auront marqué sa vie et son calvaire. Elle interprète le cabaret d'Al Dublin à la manière sombre, presque glauque de Tom Waits, dans "Boulevard Of Broken Dreams". Le même Tom Waits dont elle reprendra "Strange Weather" qui aura l'honneur de donner son nom à tout ce recueil, et auquel elle insuffle une certaine définition du mystère. Elle fait même un sort à Dylan, au travers de l'excellente "I'll Keep It With Mine" (Nico l'a reprise également sur Chelsea Girl). Malheureuse comme les pierres sur "Yesterdays", elle étale son spleen sans prétention, avec une simplicité touchante qu'on retrouve plus loin dans le blues gospel "I Ain't Going Down To The Well No More" où elle chante nue, dépouillée du moindre instrument. Exercice difficile que celui de l'a capella, mais qui ne parviendra pas à la troubler. Au blues, puisqu'on en parle, elle apporte une classe toute particulière... Il suffit de fermer les yeux en écoutant "Love, Life & Money" pour imaginer la Dame porter une cigarette lascive à sa bouche pendant la descente d'accord si reconnaissable du piano auquel elle s'est accoudée. La femme fatale de ses débuts est loin d'avoir épuisé toutes ses cartouches. De fragile elle devient assurée. Du blues mélancolique elle passe au jazz calme et tranquille de "Hello Stranger" et "Penthouse Serenade".


Cette année et cet album incarnèrent la porte de sortie de Marianne Faithfull, le regain d'optimisme (léger "Sign Of Judgement") qui lui permit de faire table rase de son passé. Mais sans pour autant oublier l'expérience qu'elle a pu en tirer : on est en droit de s'interroger, est-ce bien elle qui redonne une nouvelle vie à "As Tears Go By", ou bien est-ce l'inverse ?
Si les épreuves l'ont privé de sa blanche innocence, c'est là un diamant noir endurci qui vient nous délivrer le premier témoignage d'une renaissance artistique qui la mènera jusqu'aux années 2000 par un chemin parsemé de perles.


Chronique provenant de XSilence

TWazoo
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le 24 juil. 2015

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T. Wazoo

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