Sullen Days
7.2
Sullen Days

Album de Handwrist (2016)

Voyage engourdi dans les entrailles d'un cocon éclectique

Et voilà, votre serviteur s'est encore retrouvé embourbé dans un disque impossible à catégoriser... Je ne sais pas si c'est moi qui les attire ou quoi, m'enfin. Aujourd'hui, pioché sur la seule foi d'une belle pochette sur un site dont je tairai le nom, c'est au tour de Handwrist et de son album Sullen Days de contribuer à ma calvitie naissante alors que je gratte frénétiquement le crâne pour tenter d'en parler correctement. Passons déjà sur les détails simples : Handwrist est portugais, de Lisbonne. À sa tête, le seul et unique membre est le multi-instrumentiste Rui Botelho Rodrigues – ce que je trouve déjà difficile à croire tant sa musique sonne comme celle d'un véritable petit orchestre rock... j'imagine qu'il est excellent à tous les instruments, le salaud. Et si je devais catégoriser Sullen Days, si vraiment je devais essayer, alors je dirais quelque chose comme : (inspire) du prog/jazz-fusion/space/dream/postrock/psyché/expérimental rock sous valium. Vous ne pourrez pas dire que je ne vous avais pas prévenus.


Mais gare aux amalgames car cette liste de styles est trompeuse ; Handwrist est très loin d'être ce gloubiboulga indigeste qu'on pourrait à tort s'imaginer. Au contraire ; Rodrigues à lui seul crée ici une texture riche et cohérente, un espace sonore à l'image d'un cocon au sein duquel chaque style complimente idéalement les autres. Difficile de déterminer avec assurance et précision comment l'homme parvient à cet exploit. Mais peut-être est-ce en partie dû à l'humilité dans son approche du mixage ? Par exemple : Rodrigues, à l'image d'un Frank Zappa (dont il revendique ouvertement l'influence) ou encore d'un Matthew Friedberger (The Fiery Furnaces), semble être constamment en train d'improviser un solo de guitare sur tous ses morceaux ; seulement là où il a eu le nez creux notre ami portugais, c'est qu'il enterre ladite guitare au fond du mix au lieu de la mettre au premier plan et de nous en inonder les oreilles. À la place, c'est plutôt l'assise rythmique délicate et les arrangements éparses de claviers & Cie qui sont directement plaqués sur nos tympans. Cette guitare lointaine en constant mouvement permet à Handwrist de poser une dynamique planante au sein de laquelle il laisse l'auditeur flotter doucement tandis que l'artiste fait se mouvoir doucement ses compositions vaporeuses. Lorsqu'il parvient à mettre l'auditeur dans cet état d'attention tranquille, alors Rodrigues peut se permettre de faire un peu ce qu'il veut ; répéter à l'envie une même partie pendant 4 ou 5 minutes, comme laisse émerger petit à petit des variations chez chaque instrument, ou bien se la jouer carrément jazz à la manière d'un Zappa engourdi et partir un peu dans toutes les directions.


En bref, un disque très difficile à appréhender mais néanmoins extrêmement facile à écouter. Si je devais insister sur un seul point ce serait ce dernier ; malgré les difficultés que je peux avoir à le décrire correctement Sullen Days s'écoute vraiment sans peine, aussi bien en musique de fond qu'en se concentrant dessus. C'est simplement que son petit monde sonore est riche et vaste, et demandera nombre de voyages avant de pouvoir en faire le tour. Mais le temps consacré en vaut la chandelle...

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le 11 févr. 2016

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T. Wazoo

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