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Tarantula
5.2
Tarantula

Album de Ride (1996)

Ceci n’est pas un album de Ride. C’est une imposture et cela se remarque dès la vue de sa pochette. Un flingue pointé vers nous. Un bon résumé de l’ambiance qui devait régner dans le studio lors de l’enregistrement de cette ultime sortie.


En 1996, Ride n’est plus vraiment un groupe. Tout au plus, un projet d’Andy Bell (le second songwriter en chef) avec une section rythmique réduite en tant que faire valoir. Une impression confirmée par les faits. Bell et Mark Gardener ne se sont presque jamais croisés dans le studio, car toujours en mauvais termes depuis la fin de la tournée de Going Blank Again. Ce dernier ne chante d’ailleurs que sur deux chansons, n’en a écrit qu’une seule et n’a participé à l’écriture que d’une autre. C’est donc officiel, Tarantula n’est autre que l’album solo d’Andy Bell accompagné d’un backing band de luxe mais très mal utilisé.


Ce serait toutefois malhonnête de mettre sur le dos de Bell le déclin définitif de ces ex-surdoués. S’il possède une part de responsabilité, avoir laissé la main libre à Gardener n’aurait probablement pas évité la catastrophe. Ce dernier souhaitait faire un virage vers quelque chose de plus dance. Une décision plus osée que le rétro-rock que nous a fait subir Bell. Cela n’empêche pas que la façon d’écrire des jeunes garçons était bouleversée depuis déjà quelques temps.


Ride furent des génies en l’espace de plusieurs année, parce qu’une synergie s’était opérée entre ses quatre membres. Une logique très cohérente avec le message que véhiculait le shoegaze, puisque son état d’esprit était que la musique soit plus en avant au détriment de l’image et de l’égo d’une ou plusieurs personnes. Il n’y avait pas de chanteur charismatique chez eux mais ça n’avait aucune importance : l’intérêt n’était pas là. Il était dans cette fusion entre 4 talents ordinaires qui, réunis, produisait des compositions et des mélodies extraordinaires.


Pour couper court à tous débats, il suffit de jeter un œil aux rares morceaux écrits par Gardener : « Deep Inside My Pocket » est un fatras indigeste de blues rock et de pop psychédélique d’un autre âge. Si le riff principal est plutôt bon, son refrain niaiseux aura vite fait de faire taire ses supporters. Jugement similaire pour « Ride the Wind » : riff très bien trouvé, mélodie faisandée. Aucun des deux songwriters n’avait donc la légitimité de mener seul la barque dans cette histoire.


Pourtant, tout s’annonçait très bien avec le redoutable « Black Nite Crash ». Après avoir vainement copié les Byrds, ils s’attaquent désormais aux Rolling Stones. Un gros rock bien gras merveilleusement rythmé par la batterie de Loz Colbert. C’est même le meilleur morceau qu’ils aient écrit durant cette période post-Going Blank Again !


Ô malheur, tout s’effondre dès la seconde piste. Un blues rock décent qui s’avère être, étonnamment, une des moins pires du disque. Seule la mémorable « Walk On Water » surnage dans cet ensemble de britrock sans saveur et éventuellement « Castle On The Hill », mais plus pour son aspect acoustique que pour sa qualité.
Le reste ne décolle pas et ne pénètrera jamais dans la case "souvenirs" de notre cerveau. Même quand les Britanniques envoient la sauce à l’image de « Gonna Be Alright ».


A vrai dire, Tarantula n’est pas un massacre parce qu’il n’a plus rien à voir avec les premières années du quatuor (on peut très bien se réinventer comme par exemple Slowdive ou Ulver), il est mauvais car tellement calibré qu’il en devient inintéressant au possible.
L’écriture a beau être appliquée, elle reste dans les clous et se contente de recycler tout ce qu’il y avait de pire dans le rock de la fin des années 1960 et des années 1970. Un blues rock d’une balourdise qui confine au ridicule. Une musique d’un autre temps jouée par des jeunes qui avaient une vision et une façon de faire bien à eux pour interpréter leur pop rock. La preuve éclatante que l’orgueil d’un homme fasciné par le classic rock peut annihiler toute magie et créativité… Alors que son charisme vocal était clairement insuffisant pour qu’il puisse se mettre autant en avant (sa voix étant en plus beaucoup moins reconnaissable que celle de Gardener). Le destin le punira d’une façon amusante en le faisant rentrer dans l’écurie d’Oasis en tant que simple bassiste.


Parfaite coïncidence entre le résultat du disque et les attentes d’une époque, Tarantula fera un bide retentissant et sera retiré de la vente une semaine à peine après sa sortie. Un événement mettant un point final à l’aventure d’une formation immense dans un passé encore récent. Ce qui n’est pas plus mal, cela aura évité d’autres horreurs identiques. Car une bande qui s’arrête à temps sera toujours meilleure qu’une autre à la discographie immense et jonchée de skeuds inutiles.


De toute manière ce n’est pas grave, on peut faire comme si Tarantula n’existait pas. Puisque ce n’est pas un album de Ride.


Chronique consultable sur Forces Parallèles.

Seijitsu
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le 19 oct. 2015

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Seijitsu

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