Tectonics
7.4
Tectonics

Album de Precambrian (2020)

Des tonnes de poussières soulevées par le choc des plaques, qui se cognent, se déchiquettent et s'engloutissent, monde en mouvement, roche qui se meut avant de refroidir. Rien n'a de sens, nulle volonté, juste le passage de forces tectoniques qui se déversent inlassablement.

Derrière Precambrian se cache Roman Saenko. L'homme, farouchement secret, est une figure de la scène black metal de l'est de l'Europe. D'abord avec Hate Forest, qui en quatre disques autour des années 2000 a bâti une œuvre d'une brutalité et d'une radicalité implacable, avant de disparaître complètement (avant un retour surprise en 2020). Puis avec Drudkh, dont la longue discographie est certes parfois inégale, mais qui peut se targuer d'avoir sorti chefs d'œuvre sur chefs d'œuvre au début de son existence, allez écouter Autumn Aurora pour vous en convaincre !

Precambrian doit son nom au précambrien, l'immense période géologique allant des débuts de la Terre jusqu'à l'apparition de la vie, soit une période de 4 milliards d'années sur les 4,5 que compte notre planète. De la pochette en noir et blanc avec ce paysage entièrement minéral au titre de l'album et des chansons, tout ramène à cette ère géologique. Sans oublier le plus important, la musique, qui dépeint parfaitement cette absence de vie, ce monde uniquement habité par les forces primitives qui modèlent le monde. Comme dans Hate Forest, on est balancé dès la première seconde au milieu du chaos, les morceaux n'ayant ni début ni fin, des coupures nettes viennent seulement briser le mur de son. Le disque, ramassé sur une demi-heure tout pile, ne laisse aucun temps mort. Mais au fil des écoutes, comme souvent avec Roman Saenko, se dessine sous l'avalanche des mélodies d'abord cachées mais qui révèlent leur beauté âpre avec le temps. On reconnaît aisément la patte de son créateur à l'écoute du disque.

Au final, Tectonics est une sacrée mandale, à laquelle je ne m'étais pas préparé. J'avais oublié que l'ogre ukrainien était encore capable d'une telle brutalité, que l'on a pas connu depuis Hate Forest. Mais là où le premier projet de Saenko faisait preuve d'une misanthropie glaciale et crue, Precambrian fait preuve d'une puissance primitive qui dévaste tout sur son passage, une force brute sans conscience ni sentiment, totalement désincarnée. Et c'est parfait.


Chronique initialement publiée sur Xsilence.net

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le 21 avr. 2023

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