Figure tutélaire de la scène musicale britannique, Blur est un mirage qui n'apparait désormais qu'en de rares occasions, lorsque l'alignement des planètes permet aux quatre membres du groupe dont l'hyperactif Damon Albarn de se retrouver pour écrire ensemble une nouvelle page dans l'extraordinaire histoire de cette formation iconique.
Une surprise accentuée par le timing assez proche entre la sortie du successeur de "The Magic Whip" publié en 2015 et la dernière livrée de l'autre projet majeur de Damon Albarn, Gorillaz et son "Cracker Island" arrivé dans les bacs (et les serveurs numériques) en ce début d'année. Preuve supplémentaire, s'il en fallait une que la boulimie artistique du frontman multi casquette de Blur ne résiste pas aux standards actuels de l'industrie.
Dans cette "Ballad of Darren" de 42 minutes, on retrouve tous les ingrédients qui ont permis à ce groupe de résister à l'épreuve du temps et à la vague Britpop, qui a emportée avec elle bon nombre d'artistes vers le succès puis l'oubli : des harmonies somptueuses, des textes riches et un univers teinté d'influences passées et présentes. Les titres "The Ballad" et "Russian Strings" représentent sans doute les exemples les plus criants. Puisant leur source autant dans les compositions des Beatles que dans les derniers titres d'Arctic Monkeys, ils symbolisent la formidable synthèse de la musique britannique qu'est parvenue à réaliser Blur depuis trois décennies pour créer une signature inimitable. Mention spéciale pour le titre "Avalon" (hommage à Roxy Music ?) aux accents Bowiesque et réel morceau de bravoure de ce disque qui n'en manque pas.
Un groupe qui n'hésite pas non plus à renouer avec son propre passé à travers des morceaux comme "Barbaric", "St.Charles Square" ou le premier single "The Narcissist" que l'on pourrait volontiers retrouver dans "Modern Life is Rubbish" ou "Parklife".
Huit ans après le mitigé "The Magic Whip", Blur nous livre un disque abouti, à la construction classique, sans tomber dans la caricature et qui rappelle le talent créatif d'un groupe trop souvent cantonné à la décennie 90 mais qui n'a cessé, à chacun de ses retours de nous offrir de nouveaux délices, à déguster sans modération.