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J'avance toujours lentement, calmement, mesure métronomique, écoutant le bruit feutré de mes pas sur le sable. C'est comme une musique faite d'un silence perturbé par la répétition inlassable des temps souples et résolus de la marche... le tempo du pas. Avancer, un mouvement après l'autre. Le délié s'effectue sans heurt, amolli par la multitude des grains dorés qui couvre mes chevilles et s'efface sous le poids de mon corps. Le ruissellement ocre et mordoré d'une brillance presque irréelle fait naître des tableaux abstraits d'une beauté si pure qu'elle rappelle le silence. Silence originel et primordial vers lequel toutes les musiques, tous les sons émanant de la vie ou du mouvement tendent à se fondre, se noyer. Cela fait maintenant une moitié de ciel que je marche et je ne vois plus l'astre étincelant de la lumière mais je le devine veillant sur moi et dardant sa chaleur délectable sur ma peau nue. Mon ombre s'est presque entièrement réfugiée sous mes pas comme si elle avait trop chaud se cachant sous mon corps pourtant fin. J'ai quitté ma petite maison tôt ce matin avec un désir puissant de goûter à la journée qui s'annonce radieuse. Au souffle léger du vent, brise légère qui m'accompagne en jouant avec mes cheveux longs s'ajoute une sensation de plénitude, de bien être. La félicité ne peut imprégner qu'un esprit ouvert aux beautés du Monde : émotion brute. Bruissement, silence puis feulement qui monte et descend, souffle limpide fort puis faible qui s’éteint puis renaît. Le vent chuchote à mon oreille parfois même il fredonne des mots insondables, indicibles. Il raconte l’histoire du monde lui qui l’a vu naître, grandir, lui qui le verra mourir. Au loin je vois alors un morceau de ciel s'estomper dans un léger tremblement comme si un Dieu malin avait retiré une pièce du puzzle sur lequel je me trouve. Un peu troublé je continue néanmoins à avancer laissant errer mon regard comme une chose vivante sur les tableaux qui m'entourent. Puis le paysage devient flou réapparait mais il manque encore quelques pièces dans le bleu de la mer et le gris brun du sable. Je marche sans me soucier de ce balbutiement céleste, cette hésitation du peintre qui choisit ses couleurs trace puis efface. A nouveau le paysage tressaille, il semble se disjoindre libérant des espaces de néant puis se stabilise à nouveau mais il manque encore des pièces plus nombreuses. Maintenant Les soubresauts légers se succèdent avec lenteur et à chaque fois il manque des morceaux autour de moi. Derrière…Rien ! Je n’ai pas peur, je regarde, je ne peux rien faire, juste contempler, peut être espérer un effet inverse. Après quelques secousses nouvelles je me trouve dans un environnement fait de paysage et de vacuité. A côté de moi un endroit vide j'y passe ma main et je la vois disparaître comme fondue, dissoute, absorbée, bue par la non matière. Aucune douleur. Je m’immobilise alors et je regarde, j’envisage l’inéluctable. Petit à petit l’Océan, le Ciel, le Soleil et la Terre s'effacent…Je disparais dans le silence.

SombreLune
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le 1 déc. 2018

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