Lâcheté et mensonges
Ce commentaire n'a pas pour ambition de juger des qualités cinématographiques du film de Ladj Ly, qui sont loin d'être négligeables : même si l'on peut tiquer devant un certain goût pour le...
Par
le 29 nov. 2019
205 j'aime
152
Album peu apprécié à l'époque de sa sortie, "The Gospel According to the Meninblack" est indiscutablement celui de toute la discographie irrégulière des Stranglers qui appelle le plus une réhabilitation, au moins partielle. Rappelons d'abord qu'à l'époque, le groupe - qui connaissait un succès commercial conséquent - avait décidé - à ses risques et périls - d'expérimenter l'héroïne, et complètement perdu le contrôle de sa musique. L'idée des "Hommes en Noir" était clairement de réaliser un concept album à partir de ce qu'on qualifierait aujourd'hui d'idées conspirationnistes (les extra-terrestres interfèrent avec notre histoire, le gouvernement américain surveille tout ça !), un peu à la façon des groupes des seventies, mais en remplaçant le sérieux et le pompiérisme par de la dérision, de l'ironie, voire du franc foutage de gueule : soit un pari quand même assez risqué, en fait.
Optant pour l'électronique bizarroïde - histoire de faire ch... les punks -, déconstruisant des chansons pop qui, jouées de manière plus conventionnelle, auraient probablement constitué un album très attractif commercialement, les Stranglers mêlent - peut-être même sans s'en rendre compte, qui sait ? - un geste artistique dadaïste et leur habituelle arrogance provocatrice.
Il faut certes plusieurs écoutes pour passer outre la déconstruction sonore très conceptuelle de la première face et apprécier 5 morceaux réellement excellents derrière leurs vilains atours : de la magnifique "Valse en Noir", qui deviendra la meilleure introduction possible du groupe sur scène, au très lyrique et très prog rock "Turn the Centuries, Turn", le groupe aligne sans coup férir des chansons à la fois gracieuses et originales.
La seconde face est nettement moins inspirée, après l'intro pop accrocheuse de "Two Sunspots", mais procure encore çà et là de belles surprises sonores, comme le traitement électronique ludique de "Thrown Away" ou certains passages de la conclusion ambitieuse qu'est "Hallow to our Men".
Après ce dérapage plus ou moins incontrôlé, et ayant remis de l'ordre dans leur vie, les Étrangleurs nous reviendront au meilleur de leur forme avec leur album suivant, "la Folie", qui n'aurait sans doute pas été aussi bon sans les expérimentations étranges de son prédécesseur.
[Critique écrite en 2022]
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à sa liste Etrangleurs étranglés ? La discographie des Stranglers
Créée
le 15 janv. 2022
Critique lue 119 fois
1 j'aime
Du même critique
Ce commentaire n'a pas pour ambition de juger des qualités cinématographiques du film de Ladj Ly, qui sont loin d'être négligeables : même si l'on peut tiquer devant un certain goût pour le...
Par
le 29 nov. 2019
205 j'aime
152
Il y a longtemps que les questions morales liées à la pratique de l'Art Cinématographique, chères à Bazin ou à Rivette, ont été passées par pertes et profits par l'industrie du divertissement qui...
Par
le 15 janv. 2020
192 j'aime
118
Cette chronique est basée sur ma propre interprétation du film de Charlie Kaufman, il est recommandé de ne pas la lire avant d'avoir vu le film, pour laisser à votre imagination et votre logique la...
Par
le 15 sept. 2020
191 j'aime
25