The Hours possède une bande-originale absolument magnifique et bouleversante. Je dirais même qu'elle fait le film.
Ce qui est notable dans cette musique c'est l'absence de thème liés aux personnages. C'est d'autant plus curieux que le film est un film de personnages, plus précisément un film sur trois femmes, trois destins sur une journée. On aurait donc logiquement attendu, comme il se fait souvent dans les films hollywoodiens, trois thèmes. Mais non. En réalité, on a un thème qui est d'ailleurs une série d'arpèges et de variations en fugue. Les mêmes motifs musicaux reviennent souvent, sous différentes formes et atmosphères. C'est la musique minimaliste dont Philipp Glass est un des plus célèbres représentants. Cela souligne les liens entre les trois destins, les trois histoires de femmes. Tout étant relié au thème originel, celui de Virginia Woolf et de son livre Ms Dalloway, qui inspire les deux autres personnages (un dans les années cinquante et un à notre époque contemporaine), une forme représentant un flux continu de pensée, un temps dilaté, un bloc monolithique, qui se retrouve dans la bande originale. C'est donc une musique qui se fait écho, qui résonne en elle-même, crée des ponts, des liens entre les époques et les femmes. Et, du coup, pour un film de personnage, elle est une bande-annonce d'atmosphère, paradoxe, qui rend le film extrêmement poignant et intimiste, ce qui va de paire avec les transformations et les douleurs toutes intimes et intérieures que vivent ces trois femmes.
D'autant plus poignant que Philip Glass utilise une petite orchestration, de chambre, presque intimiste, mettant en avant le piano et les cordes (deux violons-alto-violoncelle-contrebasse) qui se répondent souvent. On constate l'utilisation régulière de la pédale de sourdine sur le piano pour crée un son étouffé et très intime. A l'inverse, l'utilisation soudaine des crescendo et decrescendo renforce les changements d'émotion et les ruptures dans le film. Cela donne également un aspect profondément romantique et mélancolique. On trouve aussi certains morceaux rythmés et ponctués qui représentent davantage un élan, de l'action au sein du long métrage. Il reprend un des thèmes (Islands) de son album Glasswork sorti dans les années 80 mais grâce à une orchestration de musique de chambre y ajoute une tension lyrique propre au cinéma.
L'incroyable cohérence de la bande son est très étonnante quand on sait que les morceaux sont des variations de compositions antérieures et différentes de Philipp Glass. C'était donc un projet très modeste à l'origine qui a remporté un franc succès et qui est devenu un ensemble poignant et intimiste. Le premier titre, The Poet Act est splendide, émouvant, triste, sombre, comme le film.