The Human Romance par Joro Andrianasolo
Malgré une carrière bien avancée (plus de quinze ans d’activité à ce jour), les américains de Darkest Hour sont longtemps demeurés inconnus hors de leur contrée. À force d’albums (le furieux Hidden Hands Of A Sadist Nation entre autres), de tournées, ils ont acquis une certaine reconnaissance artistique et une solide réputation auprès d’une large partie du public metal. Arborant fièrement leurs influences suédoises, les natifs de Washington sillonnent les routes non stop et collaborent même avec les pointures scandinaves. Cette fois, Peter Wichers (Soilwork) leur prête ses services ... en tant que producteur, pour un résultat détonant.
On stigmatise régulièrement la scène melodeath/metalcore (surtout américaine) pour la platitude des innombrables déchets qui en sont sortis. Se multipliant comme des mouches à merde accourant devant un gros étron, ils ont fini par tuer le genre. Mais quelques « gardiens » veillent à ce que de dignes représentants continuent d’animer la scène et d’en montrer le meilleur. Darkest Hour est de ceux-là. Il y a 2 ans, The Eternal Return avait justement permis de rassurer ceux qui pensaient que plus rien de bon ne pouvait être tiré du genre. Sans être un coup de génie, il apportait une fraîcheur et un dynamisme rares. L'arrivée du nouveau guitariste et le retour à un style plus direct, plus agressif, plus proche de leurs débuts avait aidé à rallier les vieux fans déçus par l'approche relativement mainstream de Deliver Us et dans une certaine mesure de The Undoing Ruin, sans renier leurs apports plus mélodiques.
The Human Romance passe pratiquement en revue tout ce que le groupe a produit en studio, depuis les 90’s. Le chant renoue modérément avec la voix claire (et elle a le bon goût de ne pas être mielleuse), l’énergie débordante du précédent opus est toujours là ("Your Everyday Disaster") et on retrouve aussi les interludes mélodiques et planantes (désormais imbriqués au sein même des morceaux, hormis l’opener “Terra Nocturnus”). Les soli de guitare sont toujours de haut niveau, quoi qu’un peu moins démonstratifs (on se souvient avec plaisir du superbe “The Tides”). Les éléments punk hardcore sont aussi de retour sur "Violent by Nature". Enfin, le groupe réintègre le long instrumental épique de fin d’album, juste avant de remettre quelques coups de massue avec un "Beyond the Live You Know" pour clôturer le disque sur une note bien pêchue.
The Human Romance reprend en grande partie les qualités de son aîné. Mais au final, il ne parvient pas à donner la même dose de plaisir auditif. Le tempo s’alourdit sur plusieurs morceaux (“Savor the Kill” et “Love As a Weapon” notamment), ce n’est pas un reproche, mais avec une discographie aussi longue que la leur (formés en 1994, pour rappel), il est apparu clair qu’ils excellent surtout dans la boucherie, mélodique, mais boucherie quand même. Par conséquent, sans qu’ils soient foncièrement mauvais, ces morceaux ont du mal à accrocher comme l’auraient fait “The Sadist Nation” ou “Blessed Infection” par le passé. L’amateur de violence mélodique « à la At The Gates » se rabattront plutôt des titres comme “Man & the Swine” ou “Wound”. Signalons aussi quelques passages peu passionnants comme “Severed Into Seperates”.
Darkest Hour a parcouru un long chemin et est parvenu, pratiquement à chaque sortie, à se montrer convaincant, au moins pour un certain public. La biographie du groupe clame avec arrogance que là où bien des musiciens ayant eu une progression similaire sont réduits à l’état de vieux fossiles jouant les rebelles, eux n’ont pas encore dévoilé toutes leurs cartouches. A l’écoute de The Human Romance, on a très envie de le croire. Et si leur prochaine offrande parvient à nous surprendre (dans le bon sens du terme), ils mériteront définitivement leur place au panthéon des acteurs discrets qui ont fait brûler et continuent de faire brûler « le feu sacré »