On peut reprocher beaucoup à Linkin Park : leurs refrains faciles, leurs structures de chansons quasi-invariables, la tête de Chester Bennington quand il chante ou encore leur fan-base parfois difficile à vivre. Mais il y a une chose qu'on ne peut pas leur enlever : depuis Minutes to Midnight, ils essayent à chaque album de se renouveler, et sont l'antithèse d'un groupe qui stagne. Il y a cependant des raisons d'être déçu par les deux derniers albums, qui n'étaient pas inintéressants dans leurs intentions mais étaient plutôt ratés. Alors, retour gagnant pour ce Hunting Party ?
D'abord, ce qui fait plaisir en écoutant l'album, c'est qu'il est extrêmement énergique, rageur même parfois, beaucoup plus que les trois précédents. On note aussi un retour des batteries et des guitares, bien présentes avec notamment des solos, nouveaux chez les californiens. Pour autant, ce n'est pas vraiment un retour aux sources : avec cet opus, Linkin Park propose une sorte de synthèse de tous leurs albums précédents. On peut entendre du Hybrid Theory dans Wastelands, du Meteora dans Guilty All the Same, du Minutes to Midnight dans Final Masquerade, du A Thousand Suns dans The Summoning, ou du Living Things dans les synthés de Rebellion. Ainsi toutes les années d'expérimentation plus ou moins heureuses du groupe se trouvent rassemblées ici, et Until it's Gone le single phare est le parfait exemple de cette synthèse.
Il y a du neuf aussi, avec des accents beaucoup plus punk sur certains morceaux, amenés dès la première seconde par la piste introductive Keys to the Kingdom et dont le meilleur exemple est War. Dans cet album Chester Bennington se casse la voix plus que jamais, cet album c'est le retour des guitares puissantes. Mais là où les deux premiers albums tiraient leur inspiration du metal, The Hunting Party lui va la chercher du côté du punk : des riffs moins mélodiques et plus "bourrins". On notera parallèlement la sublime Rebellion menée par un riff du grand Daron Malakian de System of A Down, le mélange des univers en fait ma chanson préférée sur cet album.
L'album n'est toutefois pas exempt de certains défauts : je trouve certaines chansons comme All for Nothing et surtout War peu intéressantes. Il faut dire que le punk de ces dernières années est un des genres qui m'intéresse le moins, d'autant plus que dans cet album les paroles ne sont clairement pas à la hauteur. Je dirais aussi qu'à force d'user encore et toujours le mêmes schémas le groupe finit par s'autocaricaturer, et à l'écoute de chansons comme Until it's Gone ou Wastelands une grande bataille faisait rage en moi entre l'abandon à des refrains voulus simples et efficaces, et la lassitude devant ces schémas cent fois entendus.
Certes, cet album me laisse un goût un peu amer, d'incomplétude. Comme s'il manquait un ingrédient, un morceau fédérateur dans la lignée de Numb, In the End, ou What I've Done. Mais entendons-nous bien, il n'en est pas moins très jouissif : il passe en boucle depuis 3 jours ! Une véritable bouffée d'air frais dans la discographie de Linkin Park, et une magnifique pochette en plus.