L'album de trop?
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le 5 févr. 2015
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En version originale, The Incident pourrait être considéré comme un exemple saisissant de rock progressif conceptuel : un double album avec notamment son morceau-titre de 55 minutes découpées en tranches, des styles qui chassent à la fois le folk, l’atmosphérique, le post-rock ou le métal, un livret de grande qualité avec des clichés signés Lasse Hoile et le retour, très symbolique, du mellotron pour faire bonne figure. Le successeur de l’énergique Fear of the Blank Planet (2007) ressemblait bien à un condensé clinquant et plein d’acrobaties de ce que Porcupine Tree sait faire de mieux depuis Signify (1996). La bonne nouvelle, c’est le numéro d’équilibriste impressionnant d’efficacité qui fera tituber l’auditeur au bord du précipice. Entre des mains moins habiles que celles de Steven Wilson, la chute aurait été inévitable. Ici, la verdeur déployée fait l’effet d’un oasis en plein désert. De l’introduction aux guitares incantatoires (« Occam’s Razor ») aux alternances héréditaires entre calme et saturation (« The Blind House », « Octane Twisted »), l’album passe en revue le manuel du Porcupine Tree illustré. On appréciera surtout l’attention portée aux nombreux passages acoustiques qui entrent souvent dans l’intime (« Kneel and Disconnect ») quand, en face, la magie se fait rêche et inquiétante (« The Incident »). La voix de Steven Wilson, pleine d’amertume et moins trafiquée qu’à l’accoutumée, se charge de peindre cet univers souvent désenchanté d’une douce particule de mélancolie (« I Drive the Hearse »). Sa guitare, tranchante dans la substance rêve, avance pleine d’appétit pour les zones d’ombres et boucle l’affaire en passant du bucolique au tellurique.
It’s so hard to get along, I always know what you’re gonna say, and this too, I hated you, I wish you’d learn to keep your mouth shut.
Les comparses Richard Barbieri, Colin Edwin et Gavin Harrison complètent cette addition chargée de fureter, à loisir, près de Pink Floyd (« Time Flies », superbe et très Animals) et même du Mike Oldfield des années 70 (« The Yellow Window »). Mais Steven Wilson est trop doué pour se contenter de copier ou ronronner sur ses acquis. Le second disque s’envole alors avec la même fluidité dans des arceaux parfois moins accessibles comme le long titre « Flicker » qui se propage tel une traînée de poudre ou ce « Bonnie the Cat » chuchoté, ballotté par des accents dépressifs dégénérescents. Au final, cette capacité à écrire de belles mélodies l’emporte. Sans être victime de son incessante (hyper)activité, on approche le canon qualitatif habituel de Porcupine Tree sur le piano/guitare serein de « Black Dahlia » et un « Remember Me Lover » d’une légèreté essentielle.
I was born in 67′, the year of Sgt. Pepper and Are You Experienced.
Doté d’un impressionnant casting de morceaux qui le rapprocherait d’une œuvre quasiment naturaliste, The Incident se doit malgré tout d’être apprivoisé. Le temps joue pour lui : la production, d’une richesse caractéristique, s’apparente à un paysage qui se reconstruirait après la dévastation. Elle n’épuise jamais et transforme en passionnante expérience, éprouvante parfois, une tentative trop rare de conciliation luxueuse entre l’instinct du rock intello et l’irraison de l’émotion pure. Le champ sonore devient alors universel. Malgré son succès, Steven Wilson himself jettera sur ce très bel album un regard peu complasant, le qualifiant de trop imparfait, pas assez novateur, ni créatif. La quête du succès atteinte, il préfèrera se lancer dans une carrière solo prolixe et savoureuse, plongeant Porcupine Tree dans un coma artificiel dont personne, à l’heure actuelle, ne connaît l’issue.
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Créée
le 10 mai 2015
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6 j'aime
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