The Living Road
7.7
The Living Road

Album de Lhasa (2003)

Tenue à l’écart depuis sa toute petite enfance des deux épouvantables fléaux de socialisation que sont l’école et la télévision, Lhasa de Sela (disparue à l'ge de 37 ans en 2010) était une artiste pure, à la personnalité naturellement authentique, profonde et originale.

Elevée avec ses trois sœurs dans l’itinérance d’un autocar familial pérégrinant entre les Etats-Unis et le Mexique, dépourvue de racines profondes mais riche de ses multiples influences au gré des routes, Lhasa lit, écoute, interprète et choisit de retranscrire ses émotions dans le chant et la musique. Ses parents (père mexicain, mère américaine) sont des intellectuels qui lui ouvrent l’esprit plutôt que de le conditionner. C’est de cet environnement propice à la création que Lhasa tirera la formidable substance de son art, sincère et extraordinairement humain.

Depuis qu’elle a 13 ans, elle chante en public. Dans les bars, à San Francisco, ici ou là et puis à Montréal où sa rencontre avec un guitariste (Yves Desrosiers) aboutira en 1997 à l’enregistrement d’un disque fabuleux, La Llorona (du nom de la déesse aztèque qui attirait les hommes d’un chant triste avant de les statufier d’un baiser pétrifiant) dont elle peignit elle-même la pochette et qui bouleversa un public fasciné par une voix et des compositions d’une force et d’une intensité à donner des frissons. Succès. Concerts. Puis disparition : Llasa a repris la route avec le cirque où ses sœurs trapèzent et funambulisent. Au lieu d’entretenir la flamme et empocher les gros fruits qui seraient forcément venus en produisant d’autres disques dans la foulée. Et son public n’avait plus qu’à se passer et se repasser cette mythique Llorona devenue nostalgique par conséquence en plus de mélancolique par essence.


Un voyage admirable.

Et puis, six ans plus tard, voilà que réapparaît comme par miracle notre saltimbanque, avec un disque décoré des gravures fantasmagoriques du XIXème qu’elle collectionne. The living road produit l’effet d’émouvantes retrouvailles avec une artiste qui a évolué, ouvert son champ d’influences musicales, affiné ses orchestrations, mais qui, pour le reste, le fondamental, est restée intacte. Décliné en espagnol, en français et en anglais, ce nouveau voyage est un nouvel enchantement, envoûtant, persistant, nourri de fado, de blues, de flamenco, de toutes les musiques du cœur à travers le monde, finement suggérées, sans jamais éclater vraiment et sur lesquelles la voix extraordinaire de la chanteuse façonne des ambiances très troublantes, sensuelles et presque intimes. Ceci sans aucune fausse note, sans aucune faute de goût, sans aucune concession à la facilité. Rare et admirable.


RolandCaduf
8
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le 9 oct. 2022

Critique lue 15 fois

RolandCaduf

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