The Lounge Lizards par Sledgekind
"Incident On South Street" se lance, l'album défile, pas le temps de me resservir un verre que la dernière piste ponctue ses quelques harmonies cauchemardesques, entre les deux je ne sais pas trop ce qui s'est passé mais dieu que c'était bon. Lounge Lizards m'a pris par surprise, la pochette présageait une excursion en cravatte posée, dans une cave enfumée et moîte où les fauteuils font office de trou noirs. Je me retrouve les quatres fers en l'air et la main en cloques à force de claquer des doigts. Venant d'univers différents les membres influent tour à tour des tentations stylistiques parfois rock grâce au batteur Anton Fier ou carrément bruitistes de la bouche du saxophoniste et tête de gondole John Lurie. On appréciera que les expérimentations soient assez bien dosées sans pour autant laisser l'auditeur sur sa faim, les compositions restent faciles à suivre et je n'ai pas eu à écouter Reality de Richard Anderson pour répondre à ma part de féminité qui gueulait comme une truie, ce qui pour vous est une bonne chose. Mis en vente en 1981, Lounge Lizards fignole des travaux vieux de dix ans, notamment certaines pièces de Frank Zappa ("Grand Wazoo", "Weaseals") ou plus spécifiquement le premier chef d'oeuvre d'Henry Cow, Leg End. Le défi de l'album qui semble clair à la première piste, noire à souhait, se dissoue avec un tour de passe-passe dans lequel les empreintes classiques se perdent ; et c'est tant mieux, on est en 1981, faudrait pas prendre les gens pour des cons. En ressort un album jazz punk maîtrisé qui rappelle les meilleurs moments du genre, tout en restant assez sobre pour être écouté en peignoir et pantoufles, après avoir retourné son chez soi à la brosse.