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Le retour de Head (l'un des deux guitaristes du groupe, l'ayant quitté sur une poignée d'albums) m’enthousiasmait et me faisait flipper en même temps. En effet, le mélange des deux guitares avait toujours constitué l'un des points forts de ce groupe aux influences hybrides. Cependant, une fois Head parti à la rencontre de Dieu (ou que sais-je), le groupe a réussi à continuer à proposer quelque chose d'intéressant, en s'engouffrant encore plus profondément au sein de contrées pop, électroniques et indus, sans renier bien sûr leur base metal. A ce titre, j'avais particulièrement apprécié le très "pop" Untitled, sorte d'ovni (controversé) dans leur carrière, ainsi que le plus récent The Path Of Totality (controversé lui aussi), qui surfait habilement sur la vague du brostep (le dubstep façon Skrillex en somme). C'est pourquoi j'appréhendais légèrement le retour de Head, qui je le craignais, pourrait faire renier au groupe ses nouvelles orientations.
Heureusement, il n'en est rien, puisque The Paradigm Shift constitue une sorte de synthèse de la plupart des albums du groupe post-Untouchables (on mettra de côté l'aggressif et old school Take A look In The Mirror, ainsi que le, lui aussi, très old school Korn III). On retrouve en effet le côté industriel et puissant de Untouchables (et dans une moindre mesure, de See You On The Other Side), saupoudré de quelques bouffées d'air pop bienvenues (Never Never, chanson à laquelle il faut s'habituer mais qui se révèle vraiment savoureuse à écouter en milieu d'album), et qui font notamment écho au très bon (mais sous-estimé) Untitled. Enfin, les quelques rares incursions de "drops brostep" rappellent The Path Of Totality, mais ne constituent pas l'essentiel de l'album (même si on retrouve beaucoup de bidouillages électroniques).
C'est donc à la fois la force et la faiblesse de cet album, qui se repose trop sur ses acquis, pour proposer une expérience certes très réussie, mais avec un arrière-goût de déjà entendu. L'album manque également de puissance au niveau de la production. Attention, ne me faîtes pas dire ce que je n'ai pas dit : l'album est lourd, très lourd certes. Mais je n'aurais pas été contre une orientation encore plus marquée vers un son "ultra grave", un peu comme ce que les Deftones (autre groupe phare de la scène néo, d'où ma comparaison) ont pu proposer sur leurs derniers albums (l'excellent Diamond Eyes et le chef d'oeuvre absolu Koi No Yokan), tout en affirmant encore plus les mélodies d'arrière-plan (toujours comme les Deftones ont réussi à le faire, notamment en incluant des éléments post-rock assez inédits).
Alors certes, ça regorge d'à côtés de ci de là, la basse claque bien, le tout est très énergique et assez intelligent en même temps. On retrouve tout de même une propension à une certaine facilité, avec notamment des enchaînements couplet/refrain/pont assez connus (cela dépend des chansons cela dit), ainsi que des rythmiques efficaces, mais peu innovantes (toujours pour comparer avec les Deftones, ceux-ci ont par exemple réussi à complexifier leur rythmique, pour se rapprocher, très légèrement mais tout de même, de la scène djent). Cela reste peut-être du détail, mais c'est ce qui différencie les très bons albums des chefs d'oeuvre. Et on sent dans cet album le potentiel de "chef d'oeuvre". On n'y est pas malheureusement, l'expérience n'allant pas au-delà de ce que Korn a déjà pu nous proposer dans le passé. En attendant le prochain ?