The Presidents of the United States, premier véritable album du groupe éponyme formé dès 1993 à Seattle arrive en 1995. Une fois ceci dit, on comprend que l’unique raison pour laquelle le groupe a été catalogué grunge est surtout circonstancielle. En fait de grunge, on a plutôt chez eux un rock alternatif, punk-rock teinté par une sorte de country verdoyante. S’il fallait vraiment que je choisisse une case, j’aime bien dire qu’il y a des ressemblances avec le début des White Stripes, faites-en ce que vous voulez.

Une chose très drôle avec ce groupe, au moment de cet album, c’est qu’à trois membres, deux guitaristes (pardon, un bassitariste et un guitbassiste selon leurs termes) et un batteur, nos trois gars ne cumulent que 5 cordes. Chris Ballew, au chant, joue de la guitare à deux cordes et Dave Dederer, si vous avez bien compté, dispose quant à lui du nombre faramineux de trois cordes à la sienne. Jason Finn, quant à lui, martèle joyeusement une batterie tout à fait ordinaire. Cette configuration insolite est déjà sympathique sur le papier, elle l’est tout autant dans leur son, puisque Two Strings, Three Strings and No Strings (comme ils se surnomment) sont particulièrement enthousiastes à l’idée de remettre un peu de joie et d’humour sur une scène indépendante plombée par les années Nirvana, et ce, sans la moindre prétention.

J’ai déjà raconté par ici qu’à une certaine époque, celle de la sortie de l’album, je n’avais pas des centaines d’albums à écouter chez moi, même pas des dizaines, et Presidents of the United States of America en faisait partie, en commençant d’ailleurs par le CD 2 titres de Lump. Je peux donc vous certifier que je l’ai BEAUCOUP écouté, et pourtant, je l’ai depuis laissé de côté, plusieurs fois, et j’ai retrouvé tout autant de fois, toujours avec plaisir.

L’humour auto dépréciatif en chanson, c’est quelque chose que j’adore, un des aspects que je préfère chez Alice Cooper ou chez Sparks, ici c’est donc un peu ma fête. Que ce soit Kitty et sa conclusion, We Are Not Going to Make It ou Body, on a droit à des thèmes d’une insolite banalité, menés avec foi. Le premier est mignon puis agacé, le deuxième déglingué et communicatif, le dernier exagérément dramatique. C’est toujours drôle, malin, et bien joué. Car non seulement on s’amuse, mais parfois c’est aussi très beau. Lump, qui était le premier single extrêmement populaire est aussi extrêmement efficace, drôle et irrésistible au point d’être adoubé par Weird Al lui-même (devenu, 1995 oblige, Gump). La plus belle réussite étant pour moi Peaches, qui parle…de belles pêches, voyons, quoi d'autre ! Le morceau, encore une fois très drôle, se déroule en deux actes distincts, aux guitares bucoliques dans la première partie puis un peu plus énervées par la suite. Le clip est à voir, pour son kung-fu du verger imbattable.

On admirera ailleurs les paroles mettant en scène Spiderman à la plage sur Dune Buggy avec son riff en balancier, comme un buggy coincé entre deux pentes redégringolant inlassablement le même monticule.

Feather Pluckn avec son titre qui échoue la contrepèterie (mais on comprend) est une belle déclaration d’intention, on regrette que la fin de la version album ait été tronquée de la majorité de la référence finale à I’ve Got a Feeling, un des morceaux des Beatles que je préfère. Il n’en subsiste que la phrase “Everybody supernova” mais heureusement on peut l’entendre ailleurs sur le net (et au Mont Rushmore évidemment

Kick Out the Jams est pour la peine une vraie reprise, la première version du morceau que j’ai connue, qui, s’il ne conserve pas la volonté affichée de destruction qui habitait les MC5, maintient son énergie.

Boll Weevil a quelques accents funky très cools, tandis que Back Porch pose le décor fermier, très bluegrass sans le moindre banjo. C’est assez proche de The Vandals Play Really Bad Original Country Tunes en moins parodique et c’est l’un des morceaux que je préfère sur cet album. Candy adoucit l’ambiance avant la conclusion Naked and Famous, déclaration d’intention totale et chouette fin d’album pour nos trois élus !

La carrière des Presidents of the United States of America, et je suis content d’écrire leur nom pour la dernière fois, n’a pas vraiment connu de sommets comme celui-ci malgré quelques apparitions ici et là avec des reprises rigolotes de Ca Plane Pour Moi, Video Killed the Radio Stars ou George of the Jungle. L’album patchwork Pure Frosting, qui suit, réunit pas mal de chouettes pépites également et il permet de prolonger le plaisir de ce premier album fruité et ensoleillé.

J'attends désormais le moment où, oubliant de nouveau cet album, j'y repenserai un jour de printemps et je me redirais que, quand même, avec cinq malheureuses cordes et un batteur motivé, on peut faire reverdir les années 90.

I-Reverend
8
Écrit par

Créée

le 24 avr. 2023

Critique lue 87 fois

2 j'aime

4 commentaires

I-Reverend

Écrit par

Critique lue 87 fois

2
4

D'autres avis sur The Presidents of the United States of America

Du même critique

Station to Station
I-Reverend
10

Si ce n'est pas un effet secondaire de la cocaïne je pense que ça doit être de l'amour.

Station to Station est né de l'inspiration d'un David Bowie exsangue, squelettique, se nourrissant exclusivement de poivrons, de lait et de cocaïne. Il marque une étape décisive dans la construction...

le 21 févr. 2013

59 j'aime

10

Transformer
I-Reverend
10

I keep hangin' round.

Et voilà, ça commence, les idoles tombent. C'est moche, c'est inévitable, c'est statistique. 71 ans, avec de tels antécédents c'est même pas si mal. Ca fait un moment que je me tâtais à écrire une...

le 30 juin 2022

55 j'aime

21

Le Bal des vampires
I-Reverend
10

Lalalalalalala laaa, Lalalalalalala laaa !

Un jour, j'aurai vu tous les films de vampires. Ah "Le Bal des Vampires" ! Ca me ramène à une joyeuse époque, celle où débuta mon amour immodéré des vampires, celle où, usant les genoux de mon jean...

le 6 janv. 2014

49 j'aime

48