En l'espace d'une dizaine d'années, ce groupe de Bloomington (Indiana) n'aura cessé de polir des petits galets discographiques dans un paysage indé bien trop indifférent à leur sort. Dommage et tant mieux. Early Day Miners n'est pas ce genre de groupe show-off qui culmine en deux albums et s'essouffle au troisième. Plutôt des mineurs de fond creusant une veine solitaire avec la classe intemporelle des Idaho, Swell ou Spain ! Même si le groupe a su évoluer depuis le post-rock séminal de "Let us Garlands Bring", il faut lui reconnaître une constante, le soin quasi maniaque apporté à la production, l'étirement des chansons et la création de textures sonores fussent-elles slowcore, atmosphériques ou soniques. Après l'album "Offshore" qui constituait sans conteste un sommet dans leur parcours (album à la beauté crépusculaire), comment le père Burton allait-il pourvoir se réinventer ? Et bien tout simplement en jouant de la pop pardi ! Grand bien lui en a pris. Sans renier son style, Early Days Miners accouche avec ce sixième album de son disque le plus accessible à ce jour, truffé de mélodies amples mais catchy qui s'écoutent à pleine puissance, de guitares fuzz vitaminées et d'une production ouatée à mort. Le groupe retrouve le plaisir juvénile de faire de la musique en bande. Et même le plaisir de chanter pour Daniel Burton, plus frontman que jamais, acceptant tout de même qu'une voix féminine vienne s'enrouler autour de la sienne dans un dialogue sensuel. Mieux, il s'amuse à jouer les potaches en nous proposant dès l'ouverture une petite virée nocturne : "we're going out tonight, won't you join us ?" Difficile de résister. Alors le train fonce à vive allure bien calé sur ses rails mélodiques ("In the Fire", "So Slowly" etc.). Une batterie métronomique et une basse sobre, tout en rondeur, soutiennent ce tempo imperturbable. Un peu trop de confort peut-être qui à la fin du disque me ferait presque réprimer un bâillement si le groupe n'avait le réflexe de changer un peu de braquet. L'inquiétant "The Zip" arrive à point nommé pour relancer la machine. Et surtout le beau morceau final, "Silver Oath", chanté d'une grande voix calme par une sibylle imprécatrice. Morceau hélas trop court, donc frustrant, qui confirme qu'Early Day Miners est passé maître dans l'art d'écrire des complaintes de fin du monde (souvenez-vous de "Return to the Native" !). Le vertige des profondeurs, voilà où se terre son vrai talent. (popnews)
Le collectif de Bloomington nous a souvent fait le même effet que ces amis, atteints d’un mal incurable : la lenteur. Si celle-ci fait généralement (du Crazy Horse à Low) des merveilles en terres américaines, le principe faisait chez Early Day Miners quasiment figure de handicap. C’est donc probablement une anti-mouche tsé-tsé qui a dû traverser l’Indiana récemment et transfiguré nos oursons en leur inculquant un élixir de jeunesse – une jeunesse passée en Angleterre pendant les années 80, serait-on tentés d’ajouter. On ne doute pas un instant que l’écoute soutenue du chef-d’œuvre Fear Is On Our Side (2006) de leurs voisins de label I Love You But I’ve Chosen Darkness ait pu jouer un rôle prédominant dans cette mutation.Il aura donc fallu cinq albums pour que le groupe se réinvente et aille faire un tour du côté de The Cure, Talk Talk (The Surface Of Things, impérial) ou de New Order avachi dans la grange (In The Fire, en ouverture). Puis de faire subir le même traitement aux Stockholm Monsters et à The Wake (So Slowly), transformant son handicap en alchimie. Un peu moins génialement cryptique que Windsor For The Derby, la bande de Daniel Burton évolue pourtant désormais dans le même pré carré créatif (Becloud, l’impeccable Spaces) et n’hésite pas à l’élargir vers un certain optimisme en taquinant The Beloved à la plage (le très badin How To Fall). Avant de revenir à dame nature (Silver Oath, hommage court mais sincère à Fairport Convention). Conclusion illogique d’un album long en bouche qui prouve certains Américains s’en tirent bien mieux dans la new-wave britannique que d’autres en cravates. (Magic)