J'ai déjà du écouter cet album une bonne dizaine de fois dans des contextes et avec un matériel divers. J'ai du m'émerveiller autant de fois sur la liste prestigieuse des membres de ce groupe que je vous laisse le soin de découvrir sur wikipédia ou autre.
Mais je me suis également souvent retrouvé perplexe face au silence succédant les dernières notes de Spinning In Daffodils.
C'est en ce glorieux dimanche 13 décembre que j'ai donc décidé de l'écouter, encore, mais cette fois-ci avec une attention toute particulière. Une écoute différentes des précédentes, mais qui ne m'a pas délesté de ce sentiment de perplexité. Le texte qui suit a pour vocation d'expliciter ce sentiment somme toute très subjectif mais tenace.
L'ouverture est prometteuse. D'emblée une production provocante, presque racoleuse, capte l'attention de l'auditeur, plus particulièrement s'il a déjà laissé traîner les fuzz sensuels de QotSA aux alentours de ses oreilles. On joue sur le rythme, c'est rempli à craquer mais c'est bien fait, pourquoi pas. Un premier morceau qui annonce une couleur qu'on commence à entrevoir, un solide marchepied vers... un autre marchepied? La couleur change, on retrouve la même production mais une autre idée, faux départ. Ça reste entraînant, on se laisse prendre la main par une batterie simple mais efficace, un peu amorti malgré tout par l’ascenseur émotionnel. A partir de la troisième piste l'album prend un peu d'altitude. Un aéronef au moteur surpuissant qui s'élève peu à peu au dessus du sol, les machines vrombissent, la terre s'éloigne... mais tout de même, beaucoup d'efforts et de densité pour un résultat certes intéressant mais toujours peu surprenant. On entame alors un survol de rase campagne, appuyé à la balustrade. On sait que le voyage est encore long et le talent des machinistes n'est plus à prouver. Mais enfin, ça ressemble tout de même beaucoup à un vol d'essai. Des tentatives de looping, on change de direction morceau après morceau pour des résultats presque innovant mais pas encore assez accrocheurs. Chaque première seconde de chaque piste est aussi prometteuse que sa suite est subtilement décevante. Un petit courant favorable nous fait frôler les nuages avec Elephants pour nous faire chuter un peu plus bas les trois morceaux suivants. Ça reste joli, le concept est là, mais très franchement ça manque de vie.
Mais tout est loin d'être perdu et bientôt de nouveaux paysages se profilent alors que le groupe propose quelque-chose d'autrement plus surprenant. Moins rock, moins arrogant mais gonflé d'un matériau plus subtil, attirant. A lui seul Interlude With Ludes ne présenterait peut-être pas autant d'intérêt. Mais suivant cette succession de riffs un peu trop entendus, faussement diversifiés, son déroulement flegmatique, interminable, apporte une certaine fraîcheur voire mieux : de la perspective.
C'est avec le sourire au lèvre qu'on entame le morceau suivant, à pleine dents. Ici on retrouve une rythmique acérée toujours très (trop?) légèrement audacieuse mais inclus dans une pièce un peu moins complexée, simple et juste assez sauvage. Et puis ce titre, ce titre!
A peine sorti de ce nuage électrique Caligulove nous dévoile des strates de paysage qui défilent sous l'engin qui crépite, enfin. Légère perte de vitesse, on en profite pour respirer un coup avant de rentrer dans le groove de Gunman. On sait déjà qu'on a dépassé le point culminant de l'album mais la redescente est loin d'être désagréable... Au moins jusqu'au dernier morceau de l'album. Ni début, ni fin, c'est un OVNI qu'on croise sans même en être surpris avant d'atterrir, sonné. On fait un bref salut aux pilotes avant de s'éloigner, gêné.
Ce premier album ressemble à une démonstration. Réussie quelque-part, c'est plein de talent, complexe, vaste. Mais ça manque de goût, j'ai trouvé l'ensemble plus proche d'un espèce de grand brainstorm que d'autre chose. Cet album semble en fait composé d'une succession de bonnes idées camouflées au sein d'une jungle de structures qui semblent davantage calquées d'autres projets qu'au service de celui-ci. La couleur chatoyante que l'on aurait aimé voir naître de cette collaboration ne nous apparaît qu'élidée, incomplète... C'est peut-être la promesse d'un second opus plus offensif et doté de davantage de maturité.