Moby. L'icône electro, à la fois connu et méconnu, fort d'une longue carrière sort un 14ème album assez particulier. Exit les pistes calmes qui ont fait sa principale marque de fabrique (surtout ces dernières années), et bonjour l'electro-dance punk énervé. La cassure est d'autant plus nette que cet album fait suite à Long Ambient, au nom des plus explicite et qui est le paroxysme de la zénitude.
Et pourtant cet album ne sort pas de nulle part. Car Moby, s'il symbolise l'electro, a commencé en tant que punk. Il a ensuite concentré sa carrière sur la techno, mais n'ayant qu'assez peu de succès, a sorti en 1996 Animal Rights, album punk engagé qui a failli réduire sa carrière à néant à cause d'un timing défavorable et d'un changement trop radical pour sa fanbase naissante. Il a ensuite repris l'electro et l'ambient, gagnant en popularité. Pourquoi ce retour en arrière alors ? Pourquoi prendre le risque de s'eloigner à nouveau de sa fanbase ?
Si vous pensez cela, alors vous avez tout faux. A 51 ans, Moby n'a plus de carrière à couler. Il s'attend même, selon des interviews, à un échec commercial. Mais il a la liberté de faire la musique qu'il souhaite, et c'est là une partie de sa motivation. La seconde partie, c'est l'essence de cet album. En dehors d'être un génie créatif, musicien, DJ, photographe, écrivain, il est avant tout très engagé, notamment dans la cause animale. Cet album sert à diffuser un message. Les systèmes faisant fonctionner le monde actuel sont un échec. Et quoi de mieux pour exprimer sa colère envers ces systèmes qu'un album electro punk bruyant. Il n'est plus temps de rêvasser, il faut bouger.
Je pense que les gens seront assez peu réceptifs à cet album. Un vacarme, une anomalie au son saturé qui s'est retrouvée par accident à notre époque. De plus, Moby a clairement dépassé sa période de gloire. Pourtant, il n'est pas une vieille gloire dépassée, ce n'est pas la crise de la cinquantaine qui le motive. Malgré son côté énervé, c'est l'album de la maturité. Moby sait qui il est, ce qu'il veut faire. Et c'est pour ça que These Systems are Failing est un nouveau coup de maître, pour moi. J'aime ce son saturé, ce vacarme, cet ambient-punk qui, s'il ne mets pas mon esprit dans le même état que d'habitude, me fait tout de même rêver. Des rêves plus sombres, des réflexions plus pessimistes, le sentiment que oui, these systems are failing.
Let them fail. But don't let this album fail. Donnez nous tort, à Moby et moi.
Edit : Un petit truc auquel je n'ai pas pensé. Si vous achetez le cd, prenez la version Deluxe, pour 2-3 euros de plus ça vous fait 12 titres au lieu de 9. Ces 3 chansons supplémentaires sont du même niveau que le reste, ce ne sont pas des lives, ou des accoustiques, ou des chansons remplissage dispensables. C'est peut être le seul reproche que j'ai à faire à cet album, ces trois titres supplémentaires auraient dû se trouver d'office sur le cd. D'autant plus qu'on trouve parmi elles Almost Loved, qui faisait partie des singles annonçant le retour de Moby.