Veloso et Gil. Gil et Veloso. Tropicália 2. Le Tropicália 1, est resté célèbre, album collectif sorti à l’époque de la dictature militaire, pendant la révolutionnaire année 1968. Le numéro 2, est sorti en 1992, et c’est un album anniversaire. Et on pourrait penser que tous les autres sont morts, et qu’il ne reste plus de Caetano, et Gilberto, les derniers des mohicans. Des mohicans qui parlent d’Haïti. Haïti ? Je croyais qu’on était au Brésil, et voilà qu’on me parle d’Haïti. Son climat de guerre civile, prête à exploser. Un balancement très samba, avec un rap de circonstance, un slow-rap. Pour une guerre civile de plus en Haïti. Brésil et Haïti même combat ? Peut-être.
Cinéma Novo, bossa nova la plus classique qui soit. La bossa étant entrée au patrimoine de l’humanité, mieux vaut ne pas y toucher, elle est assez belle comme ça. Laissons-nous bercer par les violons et les guitares. Et voilà que sonne Nossa Gente, la parfaite réplique des deux morceaux précédents, mais en mieux. Une basse qui roule comme un tambour ; excellent ce mouvement de basse. Et un groove qui fait regretter que le morceau ne dure que 2.53 mn, pour laisser place à l’EXPERIMENTAL : Que ! que que que QuQuQuQQu Queee ! Qe
Quee ! Q…Que !! Que Que Que Quuueeee ! Kesako ?
Des extraits de chansons tirées du répertoire brésilien, avec uniquement le mot : « Que ». Samplé à tous les modes, on dirait n disque rayé. n disque rayé. n disque rayé. n…
Des interprètes qu’on n’a pas le temps, ou qu’on aura du mal à reconnaître. De la musique conceptuelle de DJ, concrète, ou du collage sonore. Original, c’est sûr. Que q…Que…Que…Derrière on entend un son d’usine quelconque. Morceau très sobre et décharné. EXP. Des extraits de vinyls, scopitones, 45 tours…Très visuel ce morceau, très intermède à la Tex Avery carioca. Puis on revient à la normale.
Tradiçáo, très belle ballade signée Gil, suivit du pop, guitare rock, As Coisas. Une guitare électrique saturée, et un rythme très binaire. Cet album regorge de surprises. On a d’excellents musiciens derrière, et ils savent s’adapter. Pour les rythmes, c’est une perle. Aboio et Dada, deux compos coup sur coup de Veloso. Et si on sent un creux, c’est normal. Veloso est mélancolique dans l’âme, et à tendance à ralentir le tempo, d’où la sensation de vide et d’introspection, en plein milieu de l’album. Le calme, la méditation. Calme.
Et on se réveille brusquement avec le très Carlinhos Brown : Cada Macao No Seu Galho. Ne me demandez pas ce que ça veut dire. En tout cas, ça bouge ! Un hymne à la percussion brésilienne, qui a dû donner pas mal de boulot à l’arrangeur. Autant de sonorités, des percussions, et pas de cacophonie…Pas mal.
Et le magnifique : Baião Atemporal. Á deux voix. Une flûte en contrepoint. Des mélodies comme seuls les brésiliens savent en trouver. A tristeza…Ecoutez, et vous verrez.
On finit ce disque par une autre bossa atemporelle, qui adoucit les cœurs et les âmes : Desde Que O Samba É Samba. Une tristesse insondable, mais qu’est-ce que ça fait du bien, quand c’est chanté comme ça. On a finit par l’essentiel. Deux guitares, deux voix. Une déclaration d’amour à la samba, et le deuil de la tristesse, tout ça en musique. C’est beau.
Alors les esprits chagrins regretteront que le Tropicália 2, se résume à Caetano-Gil, et des musiciens de studio. Quelques classiques de leurs répertoires, un clin d’œil aux sixties. Reprise de : Wait Till Tomorow de Jimi Hendrix. Mais nous sommes en 92. Le combat pour plus de liberté, de création, d’expression, est toujours d’actualité, même si il n’y a plus de dictature au Brésil. Par contre il prend une autre forme de l’autre côté, chez le grand frère américain, avec le mouvement Hip Hop, qui ne va pas tarder à se faire bouffer par le système. Le business. Et la real politik des studios.
D’où la fraîcheur d’un morceau comme Rap Popcreto, rap expérimental s’il en est. Sample et hommage à la fois. Que..Que…Que….C’est quoi ce truc ? C’est quoi ce rap ? Album hommage et anniversaire, qui n’est pas si pantouflard, et sonne comme ça devrait sonner en 1992 par l’année 68.
Original comme cadeau d’anniversaire. Deux artistes aussi différents que complémentaires. Parabéns pra vôce.